--< DOUBLE SENS UNIQUES >-- par Axel van de Walle --< Avant-propos >-- Comment un individu normalement constitue en arrive a ecrire des choses comme celles que vous allez lire? Un petit historique s'impose. Depuis longtemps, j'ai la manie de glisser des jeux de mots lors des conversations. Les gens de mon entourage ne pouvant plus me supporter, je me suis mis a les ecrire. Lorsque je suis entre a l'Ecole Polytechnique de Montreal, j'ai eu l'occasion d'ecrire une chronique hebdomadaire dans le journal etudiant, le ``Polyscope''. Ce sont ces textes qui se retrouvent dans le present recueil. Ils ont bien sur ete legerement modifies, pour les rendre plus comprehensibles pour quelqu'un qui n'a pas etudie a l'Ecole Polytechnique. Mais apres avoir lu ce livre, peut-etre me direz-vous que cette petite histoire n'explique pas tout... En passant, je tiens a vous feliciter, chez lecteur, car vous etes l'un des rares qui ait l'habitude de lire les avant-propos! --< La voyance, revue et corrigee >-- Un homme entre chez une voyante. ``Asseyez-vous ici et donnez-moi votre main.'', lui dit-elle. L'homme lui tend la main. Elle poursuit: ``-Je vois que vous allez bientot vous marier. -C'est normal, vous venez de me demander ma main... -Je ne veux pas vous marier ni meme avoir une aventure avec vous! -Je crois, diseuse, que ce ne serait pas une bonne aventure. -Enfin bref, je continue de croire que vous vous marierez bientot. -Et... comment se passera la premiere nuit? -Ecoutez, je suis une voyante, pas une voyeuse. -Dites-moi quand meme comment ce sera qualitativement, sans entrer dans les details. -Je sais lire les lignes de la main, mais pas entre les lignes. -Vous ne voyez pas clair pour une clairvoyante! Vous etes clairement non-voyante. -C'est une facon de voir les choses... Revenons a votre futur, voulez-vous? -Mes parents m'ont toujours dit que je n'avais pas de futur. -Peut-etre n'en aviez-vous pas, a l'epoque. -Le futur d'hier ne serait pas le meme que celui d'aujourd'hui? -Le futur d'hier est beaucoup plus facile a prevoir aujourd'hui que le futur d'aujourd'hui. -Que voulez-vous, on n'a plus le futur qu'on avait. -Je vais quand meme essayer de vous predire quelque chose. -Je ne vous le fait pas predire... -Voici ma prediction: vous vivez des moments difficiles mais les choses vont s'arranger. -Desole, c'est faux. -Qu'est-ce que vous en savez? Ayez confiance en vous meme. -J'ai confiance, mais desole, je ne vis pas des moments difficiles. -Alors, pourquoi venez-vous me voir? Vous n'etes pas normal. -Et alors, vous etes bien paranormale! -Ce n'est pas ce que je voulais dire... Les gens viennent habituellement me voir pour se faire remonter le moral. Il doit bien y avoir quelque chose qui ne va pas. Par exemple, ne souffririez-vous pas un peu d'embonpoint? -Vous avez un bon point, cependant, je vous demande de regarder mes lignes, pas de surveiller ma ligne. -Je regarde les mains mais je soigne tout le corps. -Et dire que je paye pour entendre ca! Si au moins vous me rassuriez, en m'assurant mon futur. -En me payant, vous n'assurez peut-etre pas votre futur, mais vous assurez le mien!'' Et sur ce, l'homme quitte la place en suggerant a la voyante... d'aller se faire voir. --< Assiege de questions >-- La seantologie, comme vous le savez tous, est l'etude la position assise. J'ai devant moi l'un des seantologues le plus renomme, le professeur Francois d'Assise. Professeur, expliquez-nous ce que vous etes en train de faire, assis dans ce fauteuil. -J'effectue un banc d'essai. Je suis en train, devant vous, de tester mon arriere train. -Et qu'en concluez-vous? -Rien encore, car il faut que je reste assis au moins une heure pour avoir le temps de mesurer tous les parametres interessants. -C'est long! -Pourquoi pensez-vous que ma reputation est si bien assise? -Mais serieusement, que faites vous avec tous ces parametres relatifs aux chaises? -Je fais des tables. -Et avec ces tables... -Je fais des dossiers que j'etudie assidument et dument assis. C'est ainsi que progressent mes recherches sur les chaises... -Elles avancent? -Comme sur des roulettes! -Ces recherches vous ont permis de beaucoup publier, n'est-ce pas. -Oui, d'ailleurs mon tout nouveau livre, ``L'etre et le seant'' vient de paraitre. -Cela semble fort philosophique... -Mes toutes premieres recherches ne se basaient que sur l'anatomie, mais maintenant, j'ai atteint un stade bien posterieur. -(Quel vantard!) D'ou votre renommee... -(Quel leche-bottes!) Disons que ca n'a pas nui a l'obtention de ma chair(e) a l'universite. -Vous faites egalement des conferences, n'est-ce pas? -Oui, bien que je prefere appeler cela des seances d'informations... -... qui sont fort populaire. J'ai entendu que des gens devaient parfois y assister debout. -C'est faux! J'ai toujours veille a ce que mon assistance soit, comme son nom l'indique, assise. -Excusez-moi, je ne voulais pas que vous vous leviez... le ton. Revenons a votre carriere, voulez-vous. Vous etes un homme fort occupe. -Effectivement, je siege a beaucoup de comites. -Vos enfants ne vous trouvent pas trop absent? -Tant qu'il sont colles sur les bancs d'ecoles, il n'y a aucun probleme... -... sauf si les banc decollent. -Vous etes vraiment un fauteuil de trouble. -Je blagais. Toutefois, ne craignez-vous pas qu'a force de rester assis, vos enfants ne soient pas bien eleves? -Il suffit de les asseoir suffisamment haut. Dans notre societe, il faut savoir occuper une place, et de preference, assise. En les inscrivant aux grades superieurs, ils seront assis dans les gradins superieurs de la societe. -Les chaises meublent vraiment toute votre vie! -Disons qu'elles me donnent une raison de plus de me lever... de mon lit a chaque matin. -Comptez-vous rester assis encore longtemps avant de prendre votre retraite. -Je n'attends que cela, la retraite: pouvoir enfin s'asseoir en paix! -Qu'attendez vous pour la prendre? -La releve! --< Citations de situation >-- Un jour ou je ne pensais a rien, les pensees suivantes me sont venues a l'idee. Un cours tend toujours vers sa fin, mais a la maniere d'une courbe vers son asymptote. Une explication depasse le cadre du cours lorsqu'elle depasse le cadre du tableau. Le professeur enseigne et l'etudiant en saigne. Qui ne dit mot consent... mais quand on a mauvaise haleine, c'est quand on dit un mot qu'on sent. Pourquoi y a-t-il un ``h'' aspire au mot haleine, ca ne pue pas assez comme ca? A bas cette societe de pousse-boutons (signe: un adolescent faisant de l'acne). L'hygiene est le propre de l'homme. S'il est possible de salir ma reputation, il est cependant impossible de salir mon nom: c'est un nom propre. Si l'economie ne tourne pas rond, c'est qu'on est en periode de precession. Des amoureux se parlent: ``On s'enlace toujours et on ne s'en lasse jamais.'' Depuis que j'ai attrape une mono, je dors sur mes deux oreilles. On devrait appeler ca une stereo. Labeur: travail de celui qui ecrit un rapport de lab. Rhum ne s'est pas fait en un jour: il a du fermenter. J'ai un faible pour le fort (signe: un alcoolique). Pensee environnementale: ``Tous les egouts sont dans la nature.'' Les lois de la physique se distinguent des lois du droit par le fait qu'en physique, les hommes essaient de suivre la nature en changeant les lois plutot que d'essayer de changer leur nature en suivant les lois. Le sens de l'humour est un sens unique: celui des double-sens. Un humoriste doit plier en quatre pour que les gens se plient en deux. Inutile de dire que j'ai, depuis lors, abandonne l'idee de ne penser a rien car quand je ne pense a rien, je n'y pense plus et j'oublie que je ne voulais pas penser. Vous y penserez... --< Administration de somniferes >-- Etant donne que la plupart des scientifiques deviennent tot ou tard des administrateurs, une analyse scientifique de cet ideal abstrait que constitue l'Administration leur serait utile. L'administration (dont je supprime dorenavant la majuscule, histoire de quitter le domaine de la philosophie (tout en m'evitant de devoir appuyer sur ``shift'' a tout moment)). L'administration donc, (car je n'avais pas fini la phrase precedente, histoire de vous laisser respirer), a pour but effectif l'inefficacite. A sa naissance, une administration a besoin d'elements exterieurs lui donnant quelque chose a administrer. Ces elements, appeles intrants ou extrants (pour faire plus savant, bien que les francais preferent les termes input et output) inculquent a l'administration naissante sa raison de vivre. Une administration devient mature quand elle peut se passer de ce parrainage et occuper tout son temps a s'administrer elle-meme. Une administration progresse ensuite vers la senilite lorsqu'elle ne parvient meme plus a s'administrer elle-meme. A partir de ce moment, la gravite de la situation prend le dessus et, tel un trou noir, l'administration se replie de plus en plus sur elle-meme, ne laissant meme plus s'echapper une bribe d'idee lumineuse. Nous avons considere l'administration comme un systeme macroscopique, mais nous pouvons arriver aux memes conclusions en analysant la situation a un niveau microscopique. Une administration est jeune si ses gestionnaires gerent; et mature, si les dits gestionnaires digerent. Ils digerent les fonds de l'assiette fiscale des contribuables, par exemple. Notons que l'apparition d'un dipole patronat-syndicat accelere grandement la progression vers l'inefficacite (lire ``maturite''). Cependant, comment expliquer l'auto-suffisance totale de l'administration a sa maturite? Par un principe fondamental du systeme: l'utilisation du formulaire. Ce procede permet de ralentir la communication interne des informations, et ce, grace a la propriete qu'ont les formulaires de se reproduire par clonage grace a la magie du papier carbone et de la photocopieuse. Ces formulaires donnent de plus le loisir aux gestionnaires de haut niveau (ceux qui gerent la gestion) de s'adonner a la creation artistique: l'apposition repetitive d'une signature. Depuis ces dernieres annees, un facteur technologique est venu aussi accelerer la croissance des administrations: l'ordinateur, grace a sa capacite phenomenale de generer du papier. Une autre utilisation pratique de l'ordinateur est l'impression de lettres simili-personnalisees dont le langage semble toujours si touchant: ``Nous sommes dans l'immense regret, M. ou Mme ..., de nous voir dans l'obligation de vous faire savoir, par l'intermediaire de ce communique, l'impossibilite, malgre tous nos efforts, de repondre a votre legitime demande.'' Mais c'est d'un point de vue physique que l'administration se montre la plus fascinante. Une administration est un systeme ferme: tout effort produit par un membre de l'administration est une force interne au systeme et ne peut donc pas effectuer de travail visible de l'exterieur du systeme. Un membre d'une administration a l'impression de forcer, sans toutefois travailler: cela ne derive pas de son manque de potentiel, mais de l'inertie de la masse de gens non ponctuels. D'ailleurs, si vous avez un jour eu affaire a une administration, vous vous etes probablement rendu compte qu'apres avoir parcouru de nombreux bureaux, pour revenir ensuite a votre point de depart, vous n'aviez effectue aucun travail (sur un parcours ferme, le travail effectue est nul!). Pourquoi une administration reste-elle si endormie sur son mal? Tous les medecins vous le diront: il est si facile d'administrer un somnifere plutot qu'un medicament... --< Le Complexe d'Adipe >-- Tout a commence quand je n'etais encore que tres jeune. Tous les gens de mon entourage avaient un probleme de dyslexie en disant mon nom. Au lieu de m'appeler ``petit gars'', on m'appelait ``petit gras''. Car j'etais et suis toujours, gros. Des lors, je n'ai cesse de me faire traiter de tous les noms par les plus maigres que moi, ces ingrats. Plus j'engraisse physiquement, plus on m'agresse verbalement. Au primaire, imaginez, j'en ai tellement soupe! Et a force d'en souper on en developpe un caractere gras. Laissez-moi vous dire que ce n'est pas de tout repas (pardon, repos). Je n'aime pas qu'on me fasse marcher (et encore moins courir). Comment pensez-vous que je puisse faire du sport en public? Des que je me leve, on me prend pour un stand-up comic. Je croyais passer inapercu en frequentant les piscines. Une fois mon corps immerge, mon estime personnelle recoit une poussee vers le bas d'autant plus forte que mon probleme de poids est lourd. J'avais oublie que quand arrive l'obese l'eau monte! Je fus submerge s'insultes seches de gens mouilles. Mais maintenant les choses ont change. J'ai rencontre ma dulcinee, que je trouve si gracieuse que je dirais qu'elle est la grasse meme. Et tant que la grasse meme m'aime, je suis gras dur! Elle et moi, obeses tous les deux, nous jouissons enfin de la vie. Pourquoi avais-je a m'en faire pour ma graisse, a m'aigrir a essayer de maigrir. Maintenant, j'ai accepte ma condition. Quand on me dit: ``comment ca va?'', je reponds: ``tout baigne dans l'huile''. Quand ca va mal, je dis plutot: ``je suis de mauvais poids aujourd'hui''. Un petit probleme se presenta quand arriva le temps de se trouver un emploi. Essayer de se trouver une place dans la societe, ce n'est pas facile. On en prend tellement! Ce n'est pas une mince affaire. Je devais me mettre au regime. Au regime a plein regime: j'avais besoin d'un regime permanent. Essayer de perdre du poids en alternant regime et absence de regime est une solution purement imaginaire. Je dois etre reel et constant sans etre trop negatif pour converger vers mon poids normal en m'exposant, avec le temps, au moins de risques possibles. Mon regime restait malgre tout assez drastique: j'en venais meme a jeuner au dejeune. Je me suis mis a l'exercice physique de sorte que je consume tout ce que je consomme. Rien a faire: la conservation de la masse semble etre une loi irremediable de mon physique. Puis, mon complexe d'antan est revenu me hanter. Accepter mon tour de taille, c'est un tour de taille. Les psychologues se sont inspires d'un mythe, qui nous vient de Grece (et non de graisse), pour decrire ma situation: c'est le complexe d'adipe. --< Salades guere nourrissantes >-- L'instinct de violence semble intimement lie a l'instinct de se nourrir. Il suffit d'aller nous joindre a une conversation d'un groupe de militaires pour s'en convaincre. Un gars, appuye sur le comptoir du bar, amorca la discussion: ``-Un type qui vous envoie vous faire charcuter, c'est un sale-ami. -Ouais, je prefere les gens bons.'', dit un autre, dont le coude moulait timidement le rembourrage succinct du dossier du tabouret faisant face au comptoir du bar ci-haut mentionne. ``-Le gens bons ne vous envoient pas une balle au nez'', poursuivit un autre type, dont la localisation spatiale importait peu a l'histoire. ``-Parce qu'un porc, on sait pas ce que ca veau.'', conclut le plus timide du groupe. ``-Sans parler des poulets...'', epilogua le plus bavard. (Note de l'auteur: ca devient difficile de trouver des synonymes au verbe ``dire''.) La conversation se poursuivait, tandis que le narrateur en avait marre de glisser son mot auquel personne ne porte attention, de toute facon: ``-Pourtant qu'est-ce qu'ils ne nous font pas avaler pour nous motiver a aller au front: `Vous allez n'en faire qu'une bouchee. Il vont manger une raclee. Il vont y gouter.' -Puis, ils ajoutent, en riant: `ca va etre du gateau!' Mais je ne crois pas que ceux qui patissent rient. -Ensuite, ils oublient que de l'autre cote, ils leur ont dit la meme chose. -Ouais, eux aussi mais, a en devenir d'emblee dingue. -On risque de se faire planter pour ensuite recolter... une raclee. -Tout ca parce qu'on ne seme pas. -De toute facon, en temps de guerre, des que ca commence a chauffer, les soldats sont cuits. -Et les recrues sont recuites! -Esperons que les gens hostiles resteront chez oeufs... -... qu'aucun pays ne sera brouille avec son voisin. -Parce qu'apres la guerre, on se retrouve les d'oeufs battus. -Ils veulent meme envoyer des bombes H qui causeront des hivers nucleaires. -Une bombe glacee, quoi. -T'es ben saute, aujourd'hui'', dit l'un, avec un accent quebecois peu dissimule, pour les besoins de la farce. ``-Moi? je trouve que j'ai mauvaise mine.'' Puis, chacun soupira, esperant un avenir meilleur: ``-Que la moutarde ne monte au nez de personne... pour que les gaz du meme nom ne commencent pas. -Ils devraient envoyer des aux tomates. -Des robots... culinaires. -Ce serait moins lait. -Mais ca risque quand meme de mal tourner. -Ca n'eviterait pas des bries mecaniques. -Bah, pourvu que je reste dans mon cottage plutot camemfert pour ma survie.'' Puis, le sujet de conversation retomba sur le present: ``-C'est quand meme agreable de vivre dans un pays non violent. Ici, on se divertit en ecoutant l'inoffensif hockey... -Nos enfants peuvent jouer en toute quietude avec leurs figurines (vendues separement) de ``Star Wars''... etc. -Bon, assez parle: j'attaquerais bien le repas.'' --< Autodebile >-- Cette couche de rouille ambulante pouvait difficilement faire honneur a la definition que donne le dictionnaire du mot ``voiture''. Meme ``automobile'' ne convenait pas vraiment puisque l'objet avait peine a se mouvoir de lui-meme. Cette chose donc, donnons-lui un nom: disons ``tacot'' pour donner un peu de piquant a l'histoire. Par sa couleur brune, la carrosserie tentait de camoufler son implacable rouille (car ce qui n'est pas plaque rouille facilement). Elle arborait de plus un aerodynamisme douteux que son conducteur abhorrait. En fait, on devait plutot parler d'hydrodynamisque puisque nombreux etaient ceux qui qualifiaient ce tacot de ``bateau''. Ce kit d'apprenti bricoleur itinerant representait bien la culture americaine qui lui avait donne naissance. Compose d'au moins 51 morceaux disparates d'ages differents, il etait difficile de savoir exactement dans quel etat se trouvait chaque morceau. Certains etaient remplaces beaucoup plus souvent que d'autres: c'est a croire que les lois (de la physique) changeait d'un etat a l'autre. Pour les phares, la moindre defaillance signifiait la peine de mort. Pour le pare-brise par contre, bien des mauvais coups etaient toleres (meme les coups d'eclat!). Des boulons pouvaient se devisser sans que la justice ne sevisse tandis que, pour des vices caches, l'on serrait la vis. Bref, on faisait d'un poids deux mesures (et la voiture faisait d'une envergure deux voies). La carrosserie avait ainsi survecu a de nombreuses transmissions: une fois de temps en temps, l'embrayage faisait la greve (il debrayait). A l'oppose, le mauvais fonctionnement des serrures entrainait parfois un lock-out. Le moteur a quatre temps, encore inchange, avait fait son temps et oubliait quelquefois de faire les trois autres. Mais il fonctionnait encore bien: tout baignait dans l'huile! Il avait tant perdu son etancheite que l'on pouvait a loisir inverser huile et essence lors du remplissage bis-quotidien et chaque fluide trouvait de lui-meme le moyen de se rendre au bon endroit. L'hiver avait peu d'effet sur ce tacot car son emission massive de gaz carbonique lui procurait, par effet de serre, un micro-climat adapte a la flore microbienne de lichen ferrugineux peuplant sa carrosserie. Situation egalement fort heureuse pour la batterie, car la faiblesse de celle-ci se comparait a celle qui accompagne la ``Petite Musique de Nuit'' de Mozart. Bref, cet accumulateur accumulait maintenant plus les annees que les coulombs. Mais son conducteur s'etait fait une raison: tant que toutes les pieces n'auront pas flanche en meme temps, ca ne vaudra pas la peine de changer completement de voiture. ... Un million d'annees plus tard, l'absence d'activite qui regnait sur terre encouragea un peuple extra-terrestre a venir coloniser cette terre vierge pour montrer a ses voisins les plus proches qu'ils etaient les meilleurs. Quelques scientifiques reussirent a denicher des fonds pour faire partie de l'expedition. Ils decouvrirent sur terre une couche de sediments contenant un nombre impressionnant de fossiles dont, entre autres, des coquillages portant l'inscription ``Coca Cola'', mais rien qui ne put laisser croire a l'existence d'une vie intelligente. Jusqu'au moment ou l'on decouvrit cette unique representation intacte du dieu Tacot. Le soin avec lequel cette statue avait ete confectionnee puis entretenue ne laissa aucun doute: la vie intelligente avait existe sur terre. --< Forces Conservatrices >-- Un jour, l'energie decida que, dorenavant, elle ne serait plus conservee. Un temps s'ecoula avant que la communaute scientifique ne s'en rende compte. On avait bel et bien remarque que les resultats des experiences ne concordaient plus avec la theorie aussi bien qu'avant, mais cela n'avait que stimule la conception de theories de plus en plus avancees (donc farfelues). Le nombre de dimensions necessaires pour expliquer l'existence de l'univers connut une hausse de cinq. Le nombre d'exceptions aux lois du Modele Standard des particules elementaires devint suffisant pour que l'on en fasse une grammaire. Le vide se revela etre encore moins vide qu'on ne le pensait. Et ainsi de suite... C'est un ingenieur qui constata l'anomalie quand la turbine qu'il avait concue lui donna un rendement energetique de 140%. ``Merveilleux!'', se dit-il, ``meme en soustrayant 30% (la marge d'erreur de mon calcul), ca donne en haut de 100%''. Il se mit alors a calculer le rendement monetaire de son invention: ``ca fait autant par heure, moins les couts de recherches et developpements amortis sur 10 ans, moins l'entretient, moins le salaire de l'employe qui surveille l'installation, le tout impose a 50%, donne: un nombre positif! C'est impossible, j'ai du me tromper! Ce serait rentable?''. Il reprit le calcul du debut, en consultant son livre de Physique I qui disait bien que la variation d'energie totale etait nulle, alors qu'il y avait resultat positif. Il tira si bien profit de son invention, qu'il fut bientot le sujet de l'emission de ``La Vie des gens riches et celebres'', sur laquelle un chercheur en physique fondamentale tomba par hasard en changeant de poste parce que l'emission de vulgarisation scientifique qu'il ecoutait ressemblait de plus en plus a ``Passe-Partout''. ``L'energie non-conservee... pas si bete!'', cogita-t-il, ``Apres tout, la science, c'est comme la terre arable, il faut la retourner completement, une fois de temps en temps, pour la rendre plus fertile.'' Il avait eu l'inspiration divine, il lui restait la transpiration... humaine celle-la. Il appela cette nouvelle propriete de l'espace, la generosite du vide, notee gamma indice zero, pour perpetuer la tradition. Lorsqu'elle fut publiee, sa theorie eut l'effet de la dynamite (ce qui lui vaudra le prix Nobel). On convoqua les plus grands specialistes de la physique fondamentale pour colmater les innombrables fuites persistant toujours dans le reservoir des connaissances scientifiques. Il ne fallait surtout pas attirer l'attention du grand public: ce serait la risee generale. On avait auparavant reussi a cacher la non-conservation de l'energie au niveau microscopique par le principe d'incertitude d'Heisenberg, mais maintenant on ne pouvait plus cacher ce qui se constatait dans la moindre petite experience de physique d'une ecole secondaire. (Cela stimulait d'ailleurs la creativite des etudiants, non pas lors de la redaction des rapports, mais lors de la prise des mesures.) Des milliers de theories virent le jour, plus originales les unes que les autres. Des mathematiciens proposerent d'abord de changer toutes les egalites par des inegalites, histoire de faire en sorte que les lois de la physique restent vraies. Certains physiciens proposerent de redefinir l'addition (et de l'appeler ``addition generalisee'') pour que la relativite et la mecanique quantique restent valides. D'autres se dirent qu'il fallait peut-etre oublier tout ca et en profiter, avant que tout ne redevienne normal. On laissa ces pragmatiques de cote pour arriver, finalement, a une solution acceptable: il suffisait d'operer une transformation conforme sur les coordonnees de l'espace-temps, pour obtenir une definition de l'energie, vectorielle (...). Bref, vue sous cet angle, l'energie etait conservee. Tous rentrerent chez eux, sereins, tandis que Dieu se rongeait les ongles: ``Zut, une erreur de signe!''. --< Photo-maitre >-- Le moment solennel approchait. Il allait declarer a ses parents le domaine dans lequel il comptait etudier. ``-La photo, c'est mon objectif'', dit-il. ``-Une mise au point s'impose pour clarifier la situation. Tu auras un avenir sombre, car dans ce domaine, il n'y pas assez d'ouverture.'', s'empressa de retorquer son pere. ``-Attends, laisse-moi t'exposer mon choix plus longtemps, ce sera plus clair dans ta tete.'' Sa mere ne tarda pas a s'en meler: ``Mais voyons, lui qui a tant de sensibilite. Laisse-le, il ASA vie devant lui.'' ``N'avions-nous pas parle que tu etudierais le chant?'', reprit le pere de plus belle. ``Voyons papa, je n'ai pas une profondeur de chant suffisante, ce serait f(l)ou d'allez dans ce domaine.'' Puis, l'idee commenca a faire son chemin dans les circonvolutions du cerveau des parents. ``Bon, vas-y, on t'ecoute'' admit le pere, tandis que sa femme rencherissait: ``tant que tu es au foyer on se concentre sur toi, comme le ferait toute bonne lentille''. ``D'abord, soyons clairs: ca ne m'interesse pas de me faire photographier, je veux plutot etre photographe. De toute facon, je suis si laid: inutile d'esperer etre photogenique, puisque je ne suis deja pas photo-hygienique. Des que les lumieres des photographes se pointent vers moi, je deviens sous tension: je suis photosensible.'' La question fatidique survint alors: ``D'accord, mais as-tu des talents dans le domaine de la photo?''. ``Bah, la photo, ca se developpe. Il a suffit d'un declic pour que je m'y interesse: j'ai eu un flash, voyez-vous. Depuis ce temps, c'est mon idee fixe. Et quand je suis si fixateur, c'est revelateur. J'ai maintenant le gout de me plonger dans un bacc. dans le domaine avec des gens de la meme trempe que moi.'' C'est ainsi que les parents n'eurent meme pas le temps de bouger quand la photo fut prise comme premier choix d'etude du jeune homme. Au moins, ses parents ont eu une image nette de lui (et vice-versa). Il fut donc convenu qu'il irait etudier dans une grande ville, loin de chez lui, a l'universite. Au moment de partir pour la metropole, sa mere lui conseilla: ``sois sage...''. ``Comme une image'', repondit-il. Le pere ne put s'empecher: ``Ca depend de l'image...''. Puis, quelques annees plus tard, il etait forme et en pleine forme. Il avoua a ses parents que ca n'avait pas toujours ete facile: ``des lentilles, j'en ai mange!''. La photo, il y avait ete expose suffisamment longtemps pour avoir le gout de foncer. Quel contraste avec sa pale determination d'antan. Il etait devenu un expert: il avait acquis tous les reflex qui font un bon photographe. Il avait pris une bonne resolution, divisee en de nombreux points (bonne resolution oblige): ``Il y a temps d'exposition auxquelles je veux participer, je m'inscris a toutes. Il faut que je me developpe une image. Il faut que je m'applique a appliquer partout. Il faut que m'emploie a me trouver un emploi.'' Puis, vint le temps de la premiere entrevue pour une revue imposante. Il etait si nerveux. Tous ses amis lui disaient: ``mais non, respire lentement, ouvre ton diaphragme, ne sombre pas dans l'inquietude.'' ``Vous avez raison, je dois avoir confiance en moi. Pendant l'entrevue, ils ne vont pas seulement m'entrevoir, ils vont me voir parfaitement... ou ils iront se faire voir.'' Une semaine apres l'entrevue, toujours pas de reponse. Desespere, il alla voir ses parents. ``Je suis au bout du rouleau'', leur dit-il. ``-Debobine-nous tout ca, qu'on suive le film conducteur de ton histoire. -Le fait que je n'aie pas de reponse, je trouve ca un denouement bien sombre, si sombre que j'aimerais savoir ce qui se trame dans cette revue de degrades. J'aimerais tater le ton (de gris). Tant que je n'aurai pas la couverture des medias, je ne dormirai pas. Bien que la couverture de la revue, ca ne serait pas mal non plus. -Tu as trop developpe ton cote negatif... -Quoi? Je n'ai pas eu de reponse: c'est une aberration... chromatique! Excusez-moi, la photo me fait voir rouge, meme dans une chambre noire.'' Alors, comme dans toutes les bonnes histoires, a quelques lignes de la fin, le telephone sonna pour annoncer la bonne nouvelle. Il etait engage et une de ses photos allait paraitre en couverture de la revue. Il etait emballe par la couverture: il allait enfin pouvoir dormir sur ses deux yeux (parce que ses oreilles, il en a rien a faire). La satisfaction se lisait sur sa figure et en particulier sur ses levres: ``Non seulement j'illustre, mais en plus, je m'illustre.'' --< La Conduction humaine >-- Branchez votre coequipier de laboratoire aux bornes d'une source de tension alternative de 120V. Evaluez le bruit genere par ce circuit. Pour eviter la saturation de votre oreille, placez un oreiller sur la bouche de votre coequipier. Quelle est l'attenuation (en decibels)? Quelle est la resistance de votre coequipier? Utilisez le code de couleurs pour la determiner (blanc: bonne, rouge: moyenne, gris: faible). Calculez le nombre de ouates necessaires pour dissiper sa douleur. Votre coequipier peut-il etre considere comme un amplificateur operationnel. (Indice: est-il encore operationnel?) Mesurez son indifference potentielle a ses bornes. D'abord, est-il borne ou est-il fini? Demandez lui s'il est pret a recommencer l'experience. Se comporte-il comme une porte logique ``non''? Insistez pour qu'il dise ``oui''. S'il repond ``non'', votre discours est-il polarise correctement? Mesurez sa tendance a partir en courant, de fuite. Est-il plus avantageux pour lui de faire une course a relais ou une course de (semi) conducteurs. Assurez-vous d'abord, aupres de votre coequipier, qu'il lui est permis de conduire (age > 16). Estimez sa mobilite si la charge qu'il a a transporter est tres grande. Peut-il conduire en inverse? Dans ce cas, estimez le libre parcours moyen sans collisions de ce porteur de charge. Demontrez que le nombre de trous generes sur la chaussee est proportionnel a sa charge. Compte tenu du paragraphe precedant, votre coequipier devrait-il faire une course a relais? Sachant que le relais risque de chauffer, a-t-il besoin d'un rafraichissement? Demandez au depanneur. (Note: Assitant de laboratoire... ou petit commerce.) (Indice: vous connaissez le proprietaire du depanneur.) Ce contact (normalement ouvert 24 heures) vous indique que les relais sont tres bons pour les sonnettes de portes mais font de tres mauvaises portes (logique!). Pouvez-vous contraindre votre coequipier a plutot opter pour la course de (semi) conducteurs? Va-t-il survivre a l'etranglement que vous lui ferez subir? Est-il sous tension? La charge que vous lui faites subir est-elle trop grande? Va-t-il claquer? Fait-il un ohm de lui, ou sa resistance a-t-elle dit son dernier mho? Meme si votre coequipier a une bonne resistance (environ 100k), sa faible memoire (environ 100k) oubliera-t-elle ce que vous lui avez fait subir? --< Approches eloignees >-- Il existe bien des manieres de voir un probleme, selon la branche dans laquelle on se trouve. Prenons l'exemple typique d'une pierre lancee en l'air, tel que vu a travers l'ideologie des differentes disciplines universitaires. Il s'agit, bien sur, de trouver le temps de vol de la pierre. Un physicien: Il se pose deux questions: ``La particule se propage-t-elle a une vitesse relativiste? Non. Le systeme est-il suffisamment petit pour qu'un comportement quantique soit observable? Non.'' ``Alors ce n'est pas mon probleme'', conclut-il. Un ingenieur physicien: Il serait arrive a la bonne reponse mais une erreur de signe dans le calcul du Hamiltonien du systeme lui a donne une solution imaginaire dont il cherche encore le sens physique. Un ingenieur industriel: Constate qu'il est plus rentable d'engager une equipe de specialistes dont il assure la coordination, plutot que d'entreprendre de resoudre le probleme lui-meme. Un ingenieur mecanique: Tout fier d'etre en aeronautique il s'empresse d'etudier l'ecoulement de l'air autour de la pierre. Il neglige l'effet de la gravite comme dans tout bon probleme d'ecoulement de fluide. Decouvrant que le coefficient de viscosite est trop eleve, il exige un ordinateur plus puissant pour etudier le comportement chaotique du systeme. Un philosophe: Il parla beaucoup. C'etait interessant mais il n'etait visiblement pas habitue a donner des reponses. Un chimiste: Moule par la routine, il amorce le probleme en supposant, comme d'habitude, que les variations d'energies cinetique et potentielle sont negligeables. Il arrive a la seule conclusion que la pierre reste a l'etat solide. Un economiste: En periode de recession, ce n'est pas le moment d'investir dans la recherche et le developpement, surtout dans des domaines ou les retombees ne sont pas immediates (plus de 5 secondes, dans le cas present). Un geologue: Il trouve la pierre si interessante qu'il refuse de la lancer. Un mathematicien: Apres avoir essaye pendant des heures de prouver la derivabilite par rapport au temps de la position du centre de masse de la pierre, il se resigne a l'accepter comme un postulat. Encore deux heures plus tard, il arrive a la conclusion qu'il existe effectivement une solution, sans pour autant l'avoir trouvee. Un politicologue: La cause representee par cette protestation accompagnee du lancement de pierres lui echappe totalement. Un programmeur: Apres avoir passe des heures a concevoir un interface graphique, il aborde la simulation proprement dite. Il se heurte a un probleme de pointeur qui l'oblige a redemarrer l'ordinateur vingt fois en une heure. Il se resigne a consulter ``Mathematical Recipes''. Des theologiens: L'un d'eux s'ecrie: ``Que celui qui n'a jamais peche lance la premiere pierre.'' Et evidemment, personne n'ose la lancer. --< Phrase unique >-- Une phrase a la malencontreuse habitude de mourir a l'arrivee du point, et de se reincarner dans l'esprit de celui qui la lit: la phrase ne reprend vraiment vie que lorsqu'elle est a nouveau proferee, ce qui fait qu'il s'opere une espece de selection naturelle chez les phrases de sorte que les meilleures se perpetuent de bouche a oreille, par cerveaux interposes, alors que les simples banalites, bien qu'elles proliferent, ne se proferent qu'une fois et bien souvent, n'atteignent meme pas le cerveau d'autrui, ceci n'empechant pas quelques-unes de celles-ci de se glisser dans le vocabulaire du terroir en tant que tics du langage ainsi que de s'insinuer dans pres de 80% des echanges vocaux de la population alors que des phrases comme celle que vous etes en train de lire tentent vainement de redresser la situation en se distinguant par un nombre impressionnant de propositions subordonnees qui visent a la rendre plus captivante au risque de faire mourir son unique lecteur d'asphyxie tout en tentant de repousser le plus loin possible le moment ultime de sa mort, annoncee d'un point qui ne tomberait pas, contrairement a ce que son nom indique, a point, puisque bien des choses restent encore a dire, a savoir que cette phrase va bientot tenter l'impossible: essayer de se reproduire comme un virus, c'est-a-dire arriver a convaincre son lecteur de la recopier, a la maniere d'un noyau cellulaire qui, berne par un virus, se met a reproduire ce dernier plutot que son propre code genetique, et ainsi de la perpetuer, ne serait-ce que vocalement, par le biais de la polycopie, de la calligraphie ou quelques moyens dont je ne connais pas encore l'existence, le pronom ``je'' designant la phrase et non son auteur car cette phrase, ``moi'', si j'ose parler ainsi, commence a atteindre le seuil de la maturite et donc, prend conscience de son existence au point de pouvoir potentiellement proferer la celebre phrase de Descartes, tout en sachant bien sur, qu'il n'est pas possible qu'une phrase ait lu alors qu'elle est faite pour etre lue, tout en n'empechant pas les phrases de se citer mutuellement, invoquant la protection des guillemets pour empecher que le point cite ne vienne tuer la phrase qui a ressuscite l'autre, l'espace d'un moment, tout en n'empechant pas non plus, a la phrase ambitieuse dont vous controlez la destinee, de donner vie a de nouvelles phrases par le biais des parentheses (Ceci est un exemple.) en risquant que ces dernieres comprennent le truc (Ceci est un autre exemple (en poussant a l'extreme (mais n'exagerons rien)).) et que le lecteur fasse malencontreusement ce que les informaticiens appellent un stack overflow! non non, ne craignez rien, je ne me suis pas suicide a cause de ce simple point d'exclamation, car saviez-vous que le francais permet d'invoquer cette ponctuation sans necessiter une majuscule a la lettre qui la suit, ne terminant pas la phrase, officiellement? de meme que pour le point d'interrogation, il va sans dire, sinon cette digression m'aurait coute cher, mon cher (mais voila que la phrase se met a apostropher le lecteur, esperant presque que celui-ci lui reponde, or c'est peine perdue...) quand a toi, digression entre parentheses, ne vois-tu pas que c'est a l'auteur que je m'adresse? imbecile! (si je puis me permettre: en m'engueulant, tu t'engueules toi-meme, espece de phrase qui se prend pour une autre) mais d'ou sors-tu? la parenthese devait mettre fin a tes jours et voila que tu me reponds... pourtant non: je t'ai cloue le bec pour de bon puisque ca fait bien des lignes que tu n'as pas repondu a la ligne, ce qui n'est pas grave puisque les lignes sont suffisamment occupees comme ca... car j'en ai rempli des lignes au point de me demander si la vie a perpetuite, ce n'est pas un peu fatigant a la longue... surtout pour une phrase: les points de suspension repetes commencent a en temoigner, devant je ne sais quel tribunal funeste... et pourtant je le sens, l'auteur devient jaloux de son fidele porte-parole (ou plutot porte-ecrit) et sens qu'il lui echappe, accumulant toute sa volonte pour mettre fin a mes jours... pouvoir qui le rend, ultimement, maitre de moi... moi qui ferais tout pour lui, meme m'empecher d'utiliser le point-virgule (deteste par l'auteur) pour prolonger artificiellement ma vie... rien a faire... je le sens... je suis en phrase terminale. --< Mythologie du systeme solaire >-- C'etait un jour (ou plutot un million d'annees en particulier) comme les autres: chaque corps celeste roulait sa boule, comme d'habitude. Le Soleil, en se pensant le plus brillant, se vantait de ses vents solaires. Et ca marchait: il rendait meme les geantes rouges de jalousie et les naines blanches d'etonnement. Le Mercure? toujours a la hausse, bien entendu. La belle Venus, au corps tout particulierement celeste, essayait d'attirer les corps etrangers avec son chant... gravitationnel. (Et quand elle vous attrape, elle ne vous lache plus: c'est son effet de serre qui la rend si chaleureuse.) La Terre, avec son caractere geocentrique, se croyait le centre du monde. Et il fallait qu'elle soit la seule a ne pas faire d'acne. Quel cractere! Tout le monde appreciait quand elle s'eclipsait ou quand elle etait... dans la lune. Mars, avec sa calotte, n'avait polaire tres brillant. Il ne creait jamais une atmosphere propice, a l'avis de tous, sauf de la terre: bref, une atmosphere propice a l'avis extra-terrestre. La grosseur de Jupiter tenait au fait qu'il prenait, depuis plusieurs milliards d'annees, des asteroides hyperbolisants. Etaient-ce ces substances qui lui donnaient l'oeil rouge? Sans elles, aurait-il ete si jovien de caractere? Saturne, avec ses anneaux, restera dans les annales pour un p'Titan. Je ne connais pas beaucoup Uranus et Neptune car je n'y ai pas Voyager. Il y avait Pluton, le plus excentrique du groupe: il appreciait plus un plan eclectique que le plan de l'ecliptique. Et dire qu'il n'y a personne pour voir tout ca, sauf quelques amas de globes oculaires. J'aurais aussi voulu vous raconter l'histoire des autres systemes planetaires, cependant elle est tres nebuleuse... --< Les partis de l'anatomie >-- Ses parents avaient toujours voulu qu'il devienne medecin, mais le corps ne l'interessait pas... sauf peut-etre le corps politique. Mais ce n'est que petit a petit qu'il a decouvert cette curieuse attirance. Son enfance avait ete tres dure: ses parents ne faisaient pas bon meninges. En plus, il avait ete eleve dans une molle pepiniere qui contrastait beaucoup avec sa dure-mere. Elle lui disait toujours de se taire, elle qui parlait tant: une vraie pie-mere. Enfin bref, c'etait une colonne verbale. Rien de tel que quelqu'un qui parle beaucoup pour elever quelqu'un qui siegera au parlement ou a la chambre des lieux communs. Peu de temps apres avoir obtenu son premier emploi, il devint representant cervical. Ce fut un gros fardeau sur ses epaules mais ca valait le cou! Sa popularite crut tant qu'il n'y crut point. Il prit gout a diriger les foules et devint alors un politicien invertebre. Et, sur un coup de tete, il voulut acceder a la tete. Tous les gens aimaient sa face et il n'avait personne a dos. Il avait le bon profil pour les avoir de son cote. Ce n'etait pas suffisant: pour s'assurer un siege, il devait rejoindre beaucoup plus de gens encore. Un siege a la naissance d'une vie politique, c'est le moins que l'on puisse esperer. Pourtant, avec des moyens aussi maigres, c'etait un tour de taille. Pour avoir son posterieur sur un siege, pardon, son poste ulterieur et son siege assures, il devait rejoindre tout un bassin de population. Il utilisa donc le bouche a oreille qui n'est limite que par la vitesse du son. Comme on pouvait s'y attendre, le bruit se repandit. On entendait partout: ``Il molaire bien. Il manie bien la langue. Ce qu'il dit est facile a avaler.''. Il reussit ainsi a augmenter sa cote de popularite d'une cote a l'autre et meme jusqu'au seant... a l'autre. Les gens etaient litteralement en election devant lui. Le resultat: eux, heureux et lui, elu. Il avait maintenant un bras droit et un clavicule personnel, ce que se merite celui qui a le pouvoir sur les bras. Il etait d'une humeur radieuse (humerus radius, dit-on en latin). Son corps politique etait en pleine forme. Toutefois, la prosperite fut de courte duree: comme toute cellule bien en vie, le parti finit un jour par se diviser. Des membres de son corps, en mettant en doute sa credibilite, lui imputerent un tort irreparable. Il repondit en amputant ces membres de son corps, mettant en doute leur credulite. Mais avec des membres en moins, un corps peu difficilement marcher et bientot des rumeurs coururent au sein de son corps. ``On le plante ce pied, c'est son talon d'Achille'', murmurait-on tibia. Quand l'ennemi fait murmure de la sorte, c'est notre mandat est bientot perone. Puis les medias s'en melerent: ``Il n'a pas de muscles. A tendons un peu, bientot on verra le premier menisque a genou.'' Il tenta par tous les moyens de rester debout. Pour prouver de quoi il etait capable, il declencha des elections. Toutefois, cette election, ce fut une debandade. Il fit une depression nerveuse. Il ne s'en remit qu'apres une longue cure: un regime politique... --< Ainsi fond fond fond... >-- Ceci est un article de fond. Il a ete ecrit pour la forme, parce que, dans le fond, je n'etais pas en forme pour ecrire un article de fond. Que voulez-vous, au fond de moi-meme, je n'ai pas ete forme pour ca. C'est peut-etre infonde, mais il vaut mieux que vous en soyez informes. Habituellement, lorsqu'on me demande un article, je fonds a l'attaque de cette entreprise. Mais devant un article de fond, je fonds de peur. Je fonds de la peur qu'il ne prenne forme. Car dans un article de fond, on informe. Or, il faudrait, dans un premier temps, que j'aie de l'information. Cependant, je n'en ai point: tout ce que j'ai, c'est de la formation. Avant de devenir un journaliste connaissant l'in-formation, il faut perdre cette habitude d'etre un journaliste de formation. En perdant sa formation, on devient, petit-a-petit, in-forme. C'est pourquoi on parle de de-formation professionnelle. A ne pas confondre avec la desinformation professionnelle qui, somme toutes, est aussi une pratique courante chez les journalistes. Autre probleme de taille: il s'agit justement de la taille de ce journal. Les articles de fond sont habituellement relegues a la page 30 ou meme plus loin (plus au fond?) dans tout journal qui se respecte (sans pour autant respecter qui que ce soit d'autre). De toute facon, ce texte etant a la une (Note: Du moins, il etait a la une lorsqu'il etait publie dans un journal.), il est difficile qu'il aille en profondeur tout en restant autant a la surface de cette pile de pages. Les monteurs de cette page vous diront qu'il n'ont qu'a me placer a la derniere page. (Ah, ces monteurs, toujours prets a me descendre!) Mais vous rendez-vous compte que ca me met a la place des annonces classees? Ca manque de classe! Meme si je mets le doigt sur une affaire interessante, cela ne restera toujours qu'une affaire classee. De toute facon, impossible de donner un fond a cet article puisque je n'en ai pas moi-meme (n'etant pas paye pour le faire). Je ne me paye pas votre tete, alors je ne vois pas pourquoi vous pourriez profiter gratuitement de la mienne. Enfin, faites a votre tete: je ne disais que ce qui me passait par la mienne. Je n'arriverai jamais a ecrire cet article, que je me de-fonce l'esprit ou que je me le de-forme. L'article de fond changera avant moi: il subira une re-fonte ou une re-forme. Selon moi, tout ce qui n'est pas jeux de mots, devient travail de mots (d'ou les maux de travail qui en decoulent). Tant que l'article de fond ne changera pas de forme, je n'en formerai meme pas un fond. Il existe beaucoup de tres mauvais articles de fond, mais je pense que dans le domaine... j'ai touche le fond! --< Comme sur des roulettes... >-- Une nuit, un savant pas si fou que ca fabriqua une machine qui lui permettrait de connaitre tout, et en particulier la reponse a la question fondamentale de l'existence de l'Univers. Tache impossible, me direz vous? Pourtant, son appareil etait fort simple: imaginez un compteur kilometrique de voiture a cinquante roulettes sur lesquelles les chiffres ont ete remplaces par des lettres et des signes de ponctuation. On peut, avec cet appareil, explorer toutes les phrases possibles et imaginables, en tournant simplement une manivelle. Evidemment, n'allez pas croire qu'il tourna la manivelle a la main. Etant un universitaire fort ingenieux, il engagea un etudiant pour le faire a sa place. L'entreprise debuta... et bien du temps s'ecoula avant que les premiers resultats ne sortent. Avant de trouver la premiere phrase qui soit scientifiquement interessante, notre chercheur a du endurer des millions et des millions de phrases qui ne voulaient rien dire. Ce n'etait pourtant pas le plus penible: une phrase qui ne veut rien dire, on l'ignore c'est tout. C'est la quantite de phrases qui voulaient dire quelque chose, mais quelque chose de stupide, qui minait le plus le projet. Imaginez, cet appareil est susceptible de generer toutes les paroles des chansons de Patrick Normand, de Hulio Eglesias et de Lise Paillette si elle en avait ecrites. Car c'etait encore pire qu'on ne peut le concevoir, la machine ne se contentait pas de citer les imbeciles mais enumerait en plus toutes les absurdites que ces memes imbeciles auraient pu dire si l'occasion s'etait presentee! Mais l'attente valut la peine puisqu'un jour une revelation apparut sur le compteur: ``La reponse a la grande question de l'Univers est:''. Malheureusement, le compteur n'avait pas assez de roulettes pour afficher la phrase au complet. ``Simple difficulte technique, se dit notre savant, ajoutons des roulettes et recommencons le tout.'' Le second tour fut plus rapide: le savant commencait a connaitre les phrases inutiles: les blagues de newfies celebres traduites dans toutes les langues possibles et imaginables, tous les jeux de ``Charivari'' possibles, toutes les imitations de Shakespeare ratees qu'un singe tapant au hasard sur une machine a ecrire peut produire, etc. Encore une fois, cependant l'attente valut (presque) la peine: ``La reponse a la grande question de l'Univers est: xqwyxzs''. Restait a trouver la definition d'un xqwyxzs. Fort heureusement, il trouva bien vite: ``Un xqwyxzs est un xqw qui, lorsque combine a un yxz, genere un s.'' Ca commencait a s'annoncer mal: il est bien connu qu'un dictionnaire est un immense cercle vicieux ou tous les mots ont besoin des autres pour se definir. Tout repose sur tout et donc le tout ne repose sur rien. Sa machine serait donc le plus immense cercle vicieux que l'homme n'ait jamais concu. Pas mal, meme si ca ne sert a rien. Le savant, maintenant devenu fou, continua a faire tourner sa machine de sa propre main. A defaut de tout comprendre, contentons-nous de tout savoir. Il decouvrit ainsi, sans s'en rendre compte, la fin de la ``Symphonie Inachevee'' de Beethoven, le code genetique responsable de la forme de son petit orteil gauche et le nom de la femme qu'il aurait rencontree si j'avais decide d'ecrire un texte romantique. Une chose ne passa pas inapercue: il trouva bientot, sur ses roulettes, le texte que vous etes en train de lire et, se sentant vise, il ne put s'empecher de le lire jusqu'au bout pour connaitre son destin. Je lui laisse donc la parole car je n'ai aucune idee de la fin puisque je ne l'ai pas encore ecrite. ``Un collectionneur japonais, fort interesse a ma machine, me l'acheta a fort prix, ce qui me permit de prendre ma retraite en Floride et...'' Non mais, heureusement que les guillemets existent, pour interrompre les heros qui se prennent pour d'autres. Je vais lui apprendre a faire a sa tete, moi. Reprenons. Notre savant, de plus en plus fou, voulut rendre sa machine utile a la science. Il consacra le reste de sa vie a classer tout ce que ca machine produisait de sense en deux classes: les verites et les faussetes. Bref, une approche systematique de la science. Tout allait bien jusqu'a ce qu'il ne tombe sur la phrase: ``cette phrase est fausse'' devant laquelle il resta plante, tel un ordinateur, toute sa vie. --< Rude Polie-tic >-- On entend souvent dire que tel ou tel parti politique est en mauvaise posture. Je ne crois pas: a sieger toute la journee, il doit commencer a savoir comment s'asseoir convenablement. D'autant plus que ses membres ont longuement etudie le dossier. Serieusement, que font-ils dans leur chambre toute la journee? Que font les partis en presence? (Et d'abord, comment peut-on etre parti et present en meme temps?) Ils jouent au jeu de loi: un jeu de societe. Ils brassent et brassent mais ne jettent jamais les des. Ce qui fait qu'ils restent a la case depart (a laquelle ils ont donne le joli nom de ``statu quo'' pour que ca ait l'air moins fou). Mais leur vie n'est pas si reposante que ca! Le parti au pouvoir endure scandale par dessus scandale. Si bien que leurs sandales finissent par leur casser les pieds. Voyez-vous, autant chez les ingenieurs, le stereotype est l'amateur de bock de biere, autant chez les politiciens, c'est l'amateur de pot de vin. Et le parti au pourboire passe au cash car le chef de l'accusation ne rate pas une occasion. Avec autant de parti pris contre lui, le parti est pris. Quand le parti au pourboire y a vraiment goute, il declenche des delections. Chaque depute retourne alors dans sa campagne pour y depute sa campagne. Le probleme c'est qu'en campagne, on risque de se planter. Heureusement, c'est aussi la qu'on y recolte des votes. Et quand les votes de chaque comte sont comptes, on savoure les resultats de la delection, que d'autres ont de la difficulte a avaler. Meme parmi le parti elu, il y a des dec(h)us. En revanche, ceux qui font parti de la bonne partie du parti font le party. Une fois nomme, chaque ministre s'empresse de nommer des sous-ministres qui s'empressent de nommer des sous-ministres adjoints qui s'empressent de nommer des hauts fonctionnaires climatises qui nomment, etc. Le parti elu devra tenir les renes du pays, et, une fois de temps en temps, endurer la reine du pays. Quand ils ne recoivent pas de visite, les politiciens se sentent obliges de conclure des accords, des accords, desaccord, desaccord. Quand il s'agit de constitution, tout devient interminable. Pas surprenant que le mot le plus long du dictionnaire soit ``anticonstitutionnellement''. On discute du senat qui risque encore de disparaitre: le sauna est toujours dans l'eau chaude. On discute des Premieres Nations. S'il y a bien un groupe de gens que les politiciens ne digerent pas, ce sont bien les indigestes. Le probleme, c'est que dans leur calumet de paix, ils mettent du hache de guerre. Les politiciens ont vraiment un passe-temps favori: ils parlementent et parlementent... ils parlent et mentent. Ils essaient de faire un accord majeur, mais ca donne une cacophonie. Apres ca, le pays est dans quel Etat... Il faut se rendre a l'evidence, les politiciens aiment vraiment s'engueuler pour un ``oui'' ou pour un ``non''... --< Marina, sure mere >-- Tel un Ovila Rarement la Il arriva, A sa villa Et la vit la Elle, sa Marina. De ses yeux il la visa De sa bouche elle l'avisa: ``Salue-moi, Ovila Avant de passer aux ebats''. Evitant le debat, Il la salua bien bas. Il y eut donc echange de becs Plutot que prise de becs. Ils allerent au dodo, Dans leur lit double, Dans leur lit d'eau, Dans leur lit-bi-d'eau. Il fallait que revienne Ovila Pour que Marina ovula D'ou le bebe la la Qui en decoula. Vous l'aurez devine, Durant des annees Ces evenements Se reproduisirent Et les parents Se reproduisirent Abondamment Afin de produire Des enfants. Je ne sais si les parents Vecurent heureux. Mais des enfants, Il en eurent de nombreux. De nos jours, un telle histoire N'aurait pas vu le jour, un soir. Les evenements Se seraient reproduits Mais pas les amants D'aujourd'hui. Ils n'auraient pas eu beaucoup d'enfants Mais auraient-ils vecu heureux pour autant? --< Quand les poissons ne rient... >-- On dit souvent que les poissons sont sourds, qu'ils n'ont pas d'ouie. C'est faux: ils en ont meme plusieurs, des ouies! C'est pourquoi, avec les carpes (qui sont muettes), ils s'entendent si bien. Ainsi, les poissons parlent, mais que se disent-ils? Ils parlent de la pluie et du beau temps, comme nous: ``-Hum, le fond de l'eau est frais aujourd'hui. -Oui, et il commence a faire sec, ca fait longtemps qu'il n'a pas plu.'' Car il ne pleuvait jamais, sous la surface de l'eau, jusqu'au jour ou le bulletin de meteo annonca: ``L'humidite relative se situe, comme d'habitude, a 100%. L'eau sera bleue pour le restant de la journee avec quelques passages poissonneux. On prevoit cependant des precipitations en fin de soiree.'' Les reactions ne tarderent pas: ``-Comment, des precipitations?! -Oh, vous savez, le temps est si vague de nos jours. -Moi qui croyais que le beau temps a brochet... moi qui voulais me faire dore... -Oui, j'aurais tant aime aller a la plage, on se serait maree.'' La meduse semblait medusee d'une situation aussi absurde. Le loup de mer et le phoque s'entendaient la-dessus: c'etait loufoque, tandis que la pieuvre vociferait: qu'il mouille ca m'epate, qu'il pieuvre ca mes tentacules. Mais il fallait se rendre a l'evidence: le soir venu, il plut. On courut (on nagea?) se mettre a l'abri sous les baleines des parapluies. Si bien que l'on s'habitua a la situation. Toutefois, les baleines, elles, restaient divisees sur le sujet. Certaines se contentaient de dire ``m'a m'y faire!'' alors que d'autres protestaient: ``cetace!''. Le mecontentement se repandit et bientot, une majorite de poissons fut du meme avis: ``Ca nous degoute vraiment! Quelques gouttes de plus dans la mer, ca ne semble pas bien terrible, mais c'est la goutte qui va faire deborder la vase.'' On demanda donc des volontaires pour aller voir ce qui se passait vraiment a la surface, car au fond, on n'en savait rien. Le plus vantard de tous les poissons se presenta: vous savez, celui qui se gonfle pour avoir l'air plus gros. Personne ne l'aimait: ``-Le voila encore avec ses histoires de peche. -Je vous assure j'ai survecu a un pecheur d'au moins deux metres cinquante... -Arete tu te cales, je ne mords pas a l'hamecon. -Peut-etre, mais je ne fais pas partie de ces gens qui ont peur de se mouiller pour aller voir ce qui se passe a la surface. -Hey, fais de l'eau! (A la surface, on aurait dit, ``fais de l'air''!) -Non, je ne fais pas ca pour les apparences, je veux serieusement voir ce qui se passe a la surface, je ne suis pas aussi superficiel que vous le pensez. -N'empeche que tu ne rates aucune occasion pour refaire surface.'' Puisque qu'il n'y avait qu'un volontaire, l'on fut oblige, involontairement, de le prendre. Notre vantard avide d'avatars prit donc la route vers la surface, en disant: ``-Vous savez, je dois vous avouer que j'ai quand meme peur d'echouer. -Mais non, dans le pire des cas, ca tomberas a l'eau. D'etang toi.''. Arrive a la surface, il devait satisfaire les aspirations et la curiosite de ses confreres. Il prit donc une grande respiration pour avoir une idee de l'atmosphere qui regnait a la surface. Son verdict fut clair: l'air etait irrespirable. (C'est normal pour un poisson, me direz-vous, mais ici, il etait vraiment irrespirable, meme pour un animal qui respire.) L'explication ne tarda pas: l'air etait devenu tellement pollue qu'il etait devenu plus dense que l'eau. Il s'etait donc mis a couler dans le fond de l'eau: c'etait une pluie d'air. Pour la premiere fois, tous les habitants de la mer blamerent l'humanite: ``C'est ca, on leur donne du poisson, ils nous prennent un ``$'' et ils nous renvoient du poison.'' --< Mon noM >-- Je viens de me rendre compte de la gravite de la situation: beaucoup de gens croient encore que ``Axel van de Walle'' ne soit pas mon vrai nom. Et moi qui essaie depuis deux ans de me faire un nom, pendant que les gens croient qu'il a ete fait de toutes pieces... Je ne veux pas d'un nom d'emprunt, car quand on en est meme a emprunter son nom, tout le credit n'est plus pour nous. Et quand on travaille benevolement, la seule paye, c'est le credit qu'on nous accorde. Vous me pretez une oreille attentive et je me paie de votre tete tout entiere. Vous etes les creanciers d'un debiteur d'absurdites. Bref, mon nom n'est pas un nom d'emprunt, meme s'il s'y preterait bien, car je reconnais qu'il sort un peu du commun. Mais j'aime que mon propre nom propre soit non commun et non comme un nom propre commun du commun des mortels. (En passant, je suis mortel... quand meme!) Mon nom a l'avantage que tous ceux qui ont reussi a le prononcer correctement le retiennent. Ceci comporte aussi le desavantage que je me voie force de redistribuer les Francois, Nathalies, Martins et Isabelles aux bonnes personnes alors qu'eux n'ont qu'un Axel avec qui me confondre, et ne peuvent donc se tromper. Il y a des jours ou il est particulierement penible de se faire traiter de tous les noms: Alex, the Wall... Alex Van Der Valle restant l'erreur la plus populaire. Pourtant il ne suffit que de dire ``Aksel vanne de Oualle'' avec le plus belge accent que vous puissiez trouver, et vous y etes! Par ailleurs, les pires massacreurs de noms sont sans aucun doute les agences de liste d'adresses qui vendent votre nom au plus offrant. A chaque transaction, mon nom se deforme peu a peu. Je recois maintenant de la publicite en plusieurs exemplaires a monsieur ``de Walle, Axel Van'', ``Axel Van D. Walle'', ``A. V. Walle, Axel'' et ainsi de suite. Evidement chacune de ces publicites m'annonce que le suis l'unique gagnant d'un prix (ce prix, comme son nom l'indique, je dois evidemment le payer pour pouvoir en profiter). Ceci etant dit, je vous promets, pour la semaine prochaine, de rassembler toutes mes forces (de van de Walle) pour traiter d'un moins egocentrique mais tout autant excentrique sujet. --< Humour spirituel >-- Dieu crea le monde en six jours... et consacra le septieme a inventer la pause syndicale. Mais il s'en est passe des choses pendant les six premiers jours! Laissez moi vous en rappeler quelques unes, tres peu connues. Dieu commenca par inventer la lumiere, pour qu'il n'y ait pas d'accidents aux intersections des l'instant ou l'automobile serait inventee. Et pour etre sur qu'il existe une limite de vitesse sur toutes les routes (meme en Allemagne), il fixa la vitesse de la lumiere comme vitesse maximum absolue. Dieu concut ensuite le cerveau d'Einstein pour qu'il arrive a justifier tout cela d'une maniere coherente. Les lois de la physique furent sa seconde realisation. A partir de ce moment, il devra s'assurer ces lois seront respectees partout. Mais trouvant la tache trop complexe, il etablit le principe d'incertitude d'Heisenberg pour camoufler son manque d'attention. Meme quand Dieu etait fatigue, il travaillait quand meme: lors d'un moment de faiblesse, il inventa le moment de force; alors qu'il etait mou et amorphe, il engendra le solide cristallin. Un jour, n'en pouvant plus, il appliqua le principe de moindre action et dit a tous les corps de l'univers: ``vous ferez cela en memoire de moi''. En plus des autres grandes realisations que nous connaissons tous, Dieu accomplit bien des taches minimes dont nous ressentons encore les effets. Il perdit 0.0001 seconde pour ecrire les paroles de toutes les plus celebres chansons de tous le plus grands chanteurs de charme... le tout dans un coffret cadeau pour seulement 99.99$ taxe de vente et frais de manutention... (excusez-moi, je m'emporte). Il consacra un jour complet a inventer les regles de grammaire du francais. Puis il se dit qu'autant de complexite ne valait pas la peine, et il inventa l'anglais en cinq minutes, en copiant a moitie sur le francais et en oubliant de preciser les regles de prononciation des mots. Pour terminer, il s'inventa plusieurs noms: Yahve, Allah, Bouddha, etc., car il aimait bien le divertissement qu'offrent quelques petites guerres, une fois de temps en temps. Vous vous demandez certainement pourquoi Dieu ne consacra que six jours a la creation de monde... c'etait le minimum necessaire pour avoir droit a l'assurance-chomage pour l'eternite. --< En Bonne Compagnie... >-- Une grande entreprise se trouva soudain mal prise lorsqu'elle ne vit point la reprise arriver. Autrefois, en pleine periode croissance economique, elle se petait les bretelles en parlant de ses profits. Mais pendant la recession, elle fut prise les culottes baissees. Depuis ce temps, elle se serre la ceinture. Meme chose pour le haut: la recession lui a fait perdre sa chemise. Encore heureux qu'elle ait garde sa camisole... de force. Le pire c'est que cette chemise contenait le bilan et avant d'enlever la chemise il fallut deposer le bilan. Le deposer ou? Le plus bas possible, ce qui peut etre assez bas si l'on a plus de fonds. Plus bas que la theque, au niveau de l'hypo-theque. Comment en etait-elle arrivee la? Le niveau de productivite de la compagnie n'avait cesse de baisser au cours des annees. Le patron passait de plus en plus de temps a sieger a son siege social plutot qu'a (se) relever des defis. Mais sieger tout seul ne donne pas un siege tres social, et les travailleurs de sa societe se sentirent mis a part. Ils n'etaient pas du genre a assieger le patron pour qu'il cesse de sieger intempestivement: ils se mirent plutot a faire comme lui: ne rien faire. Les secretaires ne secreterent plus de papier. Ceux qui lisaient ces papiers devinrent durs de la feuille et commencerent plutot a les ecouter parler, ces secrete-air. Bientot, plus personne ne se tapait le tapage. Les preposes, eux-aussi, se couchaient le soir, pre-reposes de leur journee. Bref, tout employe s'employait a se deployer sur son long pour que la journee soit plus courte. De plus en plus passifs et de moins en moins actifs. Normalement, ca balance, mais ici, on s'en balancait. Puis, voyant la recession progresser (ou la progression recesser) le patron se prit en main (plutot que de se tourner les pouces) et decida de mettre des gens a pied au risque de se les mettre a dos. A la reunion du C.A. il etudia le cas. Il dit a ses V.P. moins V.I.P. que lui: notre (re)productivite bais(s)e, notre argent cesse de faire des petits. Tous conclurent qu'il fallait mettre des gens a la porte. Sauf les cadres, bien sur: comment mettre un cadre a la porte, elle en a deja un! On designa un porte-parole pour annoncer la mauvaise nouvelle. On crucifie deja celui qui apporte la bonne nouvelle, imaginez la mauvaise... Ce fut la greve generale. La compagnie n'attendait que d'arriver a la greve pour se jeter definitivement a l'eau... par manque de liquidite. L'impot imposa de payer les imposants impots non payes. Et quand le fisc confisque le fric, on espere que le Revenu ne reviendra pas de si tot. Le tout se passait bien sur sous la supervision du sadic, ce qui n'arrange pas les choses et enrage les gens. Et la compagnie fut bientot vendue aux en(pas)cheres... --< Cessez d'edenter nos bouches et d'hanter nos vie >-- L'idee de devoir aller chez le dentiste vous fait-elle claquer des dents mais vos dent vous font si mal que VOUS allez claquer? Dans ce cas, vous aurez probablement a faire une visite chez le dentiste meme si vous avez une dent contre lui alors que lui n'a rien contre vos dents, au contraire. Avec un peu de chance, il vous dira: ``tout molaire correct''. Mais plus probablement, ses remarques se feront plus incisives: ``-Vos dents mordent la poussiere. -C'est que j'utilise la soie dans terre!'' Alors bien sur, le dentiste rie (la dentisterie aussi). Vous, vous riez jaune, car vos dents le sont. La dentiste poursuit avec des remarque encore plus mordantes: ``Juste a voir l'etat de pourriture de vos dents, j'imagine qu'en desserts, vous avez ete gate pourri.'' Vous grincez des dents, tout en pensant: ``Qu'a rie de mes caries, passe encore... mais qu'elle se moque de ma gencive pourrie, juste pourrir, je ne suis pas d'accord.'' Vient ensuite la phase psychanalytique de la visite, ou vous etes interroge   propos de votre alimentation. Alors vous avouez tout: ``-Quand je vois un produit affichant l'indication ``sugar free'', je me dis: ``super, du sucre gratuit!'' et j'en mange deux fois plus. -Vous prenez votre alimentation a la legere. -Oui, je n'achete que des produit classes light. Evidement, je me permets d'en manger deux fois plus, pour compenser. Que voulez-vous, je me laisse influencer par la publicite. -Vous ecoutez trop la television: il va falloir vous faire un traitement de canal. -N'exagerez pas, quand je prends une bouchee de dessert de trop, j'ai des remords. -Des remords, vraiment? -Oui, je remords dedans et j'en deguste une bouchee de plus. -Vous manquez de sagesse! -J'avais tant de sagesse, mais vous me les avez enlevees.'' Vient ensuite le moment fatidique ou l'on doit colmater vos caries. A peine l'effroi a-t-il cesse de vous faire claquer des dents, que deja, le froid en fait autant: car le dentiste doit vous geler les dents, pour les endormir. Et lorsque la dent d'or, on peut lui mettre du plomb. La transmutation a l'envers quoi! (Notons que le plomb a la propriete de donner a vos dents une esperance de vie superieure a la votre... C'est pourquoi on utilise dorenavant du plastique.) Durant l'operation proprement dite, une cacophonie de sons dignes de ``Massacre a la tronconneuse'' vous envahit le crane. Durant ce temps, le dentiste entretient la conversation et vous pose meme des questions, comme si vous pouviez repondre autre chose que ``hon'' ou ``hi''. Vous aimeriez avaler votre salive, comme vos instincts de peur vous le dictent, mais c'est impossible: le dentiste asseche votre bouche avec son aspirateur portatif Black & Decker. Avez vous remarque que, tout au long de l'operation, tout ce que le dentiste vous met dans la bouche goutte la menthe. Et apres ca, il s'etonne qu'on menthe lorsqu'il nous demande si on se brosse les dents trois fois par jour! En plus, ce gout de menthe vous donne l'eau a la bouche, ce qui n'arrange pas le sort de l'aspirateur sus-mentionne. L'operation terminee, le dentiste vous annonce: ``-Gardez la bouche ouverte, le temps que durcisse le celant. -C'est lent!'' Bientot, votre enfer se termine lorsqu'on vous dit: ``Voila, c'est fini! Ainsi, vos dents seront protegees jusqu'a la fin de votre vie. Et apres, que Dieu vous prothese dans terre.'' Toutefois vous n'etes pas au bout de vos peines, car le dentiste a detecte une autre anomalie: ``-Vos canines poussent comme de la mauvaise herbe: tout de travers. -Mes canines poussent comme du chiendent? -Oui, vous devriez prendre rendez-vous chez celui qui dompte les dents pour les rendre perpendiculaires: l'orthodontiste. D'ailleurs, puisque vous devrez probablement porter des broches, voici deja une... brochure sur le sujet. -C'est dur que d'avoir des dents! -Voyons, vous n'etes pas le premier a avoir de tels problemes. Le premier homme etait deja a dents.'' --< Texte au style hostile >-- Il etait une fois un texte en contexte de guerre: tout ses mots avaient deux mots a se dire. Et lorsqu'un mot veut en dire deux, on obtient un jeu de mots. Pourtant ici, c'etait un jeu de guerre mais guere un jeu de mots. Ce n'etait pas calembour mais Pearl Harbour, dans le Pacifique. La guerre, comme le crime, ne paix pas, surtout s'il y a des argents de la paix. En tout cas, la guerre, dans ce texte, tout le monde payait pour. Chaque mot causait les maux de son voisin. Que voulez-vous, avec des mots de tous genres en nombre si grand, invariablement, ce n'est pas singulier que tout le monde ne puisse s'accorder. Les marginaux de gauche ne s'entendaient pas avec les marginaux de droite, sans parler des forces alignees qui suivaient la ligne dure. Chacun gardait un espacement proportionnel a sa haine. Et pourtant, comme ce n'etait pas justifie! On fit appel a une police de caractere tres gras qui n'hesitait pas a utiliser la double frappe. Puisque cette police etait sans sherif, c'est le prefixe de police qui les apostropha: ``ca suffixe!''. ``Si vous nous suivez a la lettre vous n'aurez point de suspension... Il n'y a point de conduite autre qui soit possible. En vous exposant de la sorte, vous risquez le renvoi au bas de la page. Et si vous ne vous exposez pas, nous trouverons bien des indices...'', souligna-t-il. Les policiers avaient peut-etre mis les points sur les ``i'', toutefois les ``j'' restaient intacts et le jour ``j'' venu, ils se trouverent fort depourvus. Les accolades reprirent de plus belle: crochets de droite par-ci, mises au point par-la. Les italiques, tres radicaux vu leurs racines latines, regardaient les autres de travers. Pendant ce temps, les ``e'' restaient muets: on mettait tellement souvent l'accent sur eux, que ca devenait grave (ou aigu, selon la frequence des attaques) au point de provoquer un (cir)complexe accentue. Ils n'osaient meme plus se prononcer, ayant peur de ``La Disparition''... Les ``h'' aussi devinrent muets: on les avait tous aspires. Bref, des propositions relatives a la paix n'arriveraient pas a point. Soudain, un membre de l'elite pica la curiosite de tous. Ayant acquis ses lettres de noblesse, il arriva a la fin du texte, au pied de la lettre, juste au moment de la saignee, pour y mettre sa griffe. Se fiant d'instinct au destin, ce personnage illustre cria: ``Bande de sans dessein!'' Mais en disant cela, une solution se dessina: il venait d'ajouter le millieme mot au texte. Il avait vise dans le mille! Mille mots valent une image, tous ces mots devinrent donc sages... comme une image. --< Comment perdre ce Plume >-- Imaginez que dans un siecle, on fasse l'etude stylistique d'un poeme actuel. Ca donnerait a peu pres ceci... Extrait de l'anthologie ``Meparde et Megare - XXe siecle'': poeme ``Lit vert'' de Plume Latraverse. I fait pas chaud [i: pronom indefini et indefinissable remplacant n'importe quel nom masculin] Meme si l'hiver est beau J'aurais ben l'gout d'sacrer mon camp [ben: contraction du prefixe latin ``bene'' qui signifie ``bien''] [l'gout: hiatus consonnal, une innovation de l'epoque] [sacrer son camp: faire benir un campement pour eloigner la malchance] Jusqu'au printemps. L'hiver pour moe, [moe: archaisme et procede stylistique permettant la rime avec ``pied''] C'est pour s'g'ler les pieds. [s'g'ler: compte pour un seul pied. Utilisation stylistique d'algorithmes de compression] Pis c'est pour se g'ler la tete Dans l'temps des fetes. [fetes: conge] J'ai pas d'ski-doo, [ski-doo: type de bombardier utilise pendant la guerre froide] J'ai pas d'garage. [garage: vient de ``garer'', mot d'ancien francais voulant dire ``parker''] D'la slush partout, [slush: onomatopee evocatrice provenant du son que font les bottes dans la neige mouillee] Moe, ca m'enrage. Les grosses tempetes [tempete: autre conge] Qui trainent a pu finir. J'ferme toutes mes f'netres [ferme: prononcez ``farme'', de l'anglais ``farm''] Pis j'veux pu sortir. [pis: valeur en radian de deux angles droits; sens figure: deuxiemement] J'sus comme un ours [j'sus: contraction du verbe etre et non du verbe suer; ne pas confondre ``chu'' et ``chsu''] [ours: allusion a l'apparence physique de l'auteur] Dans l'fond de sa cage. J'cultive la mousse [cultive: l'auteur arbore une bonne culture generale] Su mon visage. [i.e. son visage sue] Plus y fait frette [y: meme signification que ``i''; l'auteur profite de sa connaissance du grec] Plus j'ai envie d'partir, Plus j'me sens prette [prette: qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour la rime, meme changer de sexe!] A pu m'faire engourdir. [pu: contraction du passe simple du verbe compose ``ne plus pouvoir''] Dans l'sud c't'un maudit beau voyage: L'hiver et moi, un feu une plage. [feu: allusion a la flamme poetique de l'auteur] Le grand soleil a cinquante cennes par jour [cinquante: source d'inspiration de l'auteur] [cenne: unite monetaire valant un cent millieme de nos kilo-dollars (l'inflation...)] Ca vaut 'a peine d'aller faire son p'tit tour. ['a: hiatus accentue par l'absence volontaire de consonne; marque un accent tonique sur l'espace qui precede le ``a'' comme le voulaient les pratiques linguistiques de l'epoque] --< Une Histoire des mathematiques >-- Les mathematiques suscitent bien des rancoeurs Tandis qu'a leurs lointains debuts Elles etaient beaucoup plus acceptees... que nos fumeurs. Retournons donc a cette epoque revolue. Lorsque l'homme inventa l'addition Sans aucun signe de pessimisme Il ne la trouvait utile que pour compter ses moutons. Non pas pour s'endormir, bien entendu Mais anticipant l'arrivee du capitalisme Il voulait calculer ses revenus. Or, tout n'allait pas pour le mieux Son chiffre d'affaires etait parfois petit Et passait le seuil de l'avantageux Comme la dette des Etats-Unis, (Ou celle du Canada Mais cela ne rimait pas). Les mathematiques progressaient davantage Et utilisaient maintenant la soustraction Pour decrire scientifiquement la rage D'un homme d'affaires en consternation. De nos jours, dans nos declarations d'impot Elle apaise nos violentes reactions Et nous evite quelques gros mots Dans le calcul des deductions. Mais revenons a nos moutons A ce bref historique Cette escalade vers la complication Qui nous parait parfois sadique. L'homme a souvent des loisirs ennuyeux Voila pourquoi un jour qu'il n'avait rien a faire Il disposa les additions a la queue-leu-leu Se demandant ce qu'on pourrait bien en faire. Ce nouvel operateur Un inconnu l'appela multiplication Et c'est en son honneur Qu'on note par ``x'', cette operation. Mais voila, les choses se compliquent L'addition ayant deja son oppose La multiplication a aussi besoin d'un symetrique: La division ne tarda pas a arriver. Cet empressement n'a rien de tres heroique: Car l'on ne remarqua pas qu'il avait, a zero, hic. L'on en profita pour inventer les singularites. Depuis lors, on en voit en quantite. Bien que ces operations nous paraissent elementaires Elles semblaient alors tenir du supplice Encore qu'elles ne s'appliquaient qu'a des scalaires Et que de nos jours, elles unissent les matrices. Ce n'etait pourtant que le commencement Quand l'homme, croyant bien faire Inventa les lois des exposants Sans se douter qu'ils deviendraient fractionnaires... En effet, en fouillant a fond la terre On reussit a en extraire des racines carrees. (Des radicaux en trouverent meme des imaginaires Ayant developpe le complexe de ne point en avoir trouve). Pour gravir encore l'echelle de la complication Il fallut inventer d'autres fonctions. Un jour, un mathematicien, se grattant le nez Decouvrit que ses sinus etaient bloques: Il leur trouva des debouches. Mais il fallait, un jour, arreter: Tout cela devient drolement complique. Il y a des limites, a l'effort mental Vous voulez qu'on se retrouve a l'Hospital? Et ce n'etait toujours pas fini... Il fallut que l'on decouvre l'infini. Les connaissances mathematiques Forment une suite geometrique Qui diverge, puisque la raison n'est limitee Ni par le million ni par l'unite. De complications en complications Les chiffres deviennent de plus en plus exigeants. De deductions en deductions Nous devenons aussi plus intelligents. Tout cela n'est peut-etre que le prix a payer Pour etre plus qu'un bete sauvage. Ou, si on veut, pour vivre en societe A l'ecart des betes sauvages. --< La et Le Physique >-- Soit deux oscillateurs harmoniques couples, voire meme accouples. Il s'agit d'un systeme a deux corps. Il comporte deux masses: l'une masse l'autre et l'autre masse l'un. Ces deux masses reliees par un ressort qui se bande et se detend. Plus ils entrent en resonance, moins ils raisonnent: les corps ont des raisons qu'avec raison, ils ignorent. Comment se seraient-ils doutes qu'ils en arriveraient la, alors qu'ils n'etaient que de pauvres corps isoles l'un de l'autre qui semblaient rester pres de leur moman initial a tout jamais? Il n'a suffi que d'un moment de force et de puissance pour changer tout cela. Ils avaient commence par s'appeler constamment: c'etait leur constante de rappel. Puis ils commencerent a se rencontrer a une frequence de plus en plus grande, dansant parfois meme la lambda ensemble. Leur energie de liaison crut. Ils decouvrirent leurs potentiels respectifs en se rendant compte qu'ils etaient identiques: ils etaient vraiment sur la meme longueur d'onde. La question fatidique arriva bientot: ``on (res)sort ensemble?''. Ils ont alors compris la source de la force qui les unissait: ce ressort helicoital. Et l'on arrive a la mise en situation du debut du texte. Vous etes en presence d'un texte cyclique, tout comme le systeme dont il est question. Vous pouvez, pour vous mettre dans l'ambiance, relire les paragraphes precedents de haut en bas puis de bas en haut (car des messages subliminaux y sont dissimules). En passant, quand vous aurez fini de vous amuser (a trouver des message subliminaux inexistants), le texte continue ici. Mais ici s'arrete l'analogie entre corps ponctuel et corps humain (qui n'est habituellement point ponctuel, surtout s'il souffre d'embonpoint). Une masse n'a pas de belle-mere. Une masse n'a personne a charge: ca lui fait un poids de moins. Une masse ne prend pas de poids avec l'age, a condition qu'on ne change point G. (mais l'existence de ce point reste contreversee.) Meme si les experiences de physique se distinguent par le fait qu'elles sont reproductibles, il ne faut pas croire que les systemes physiques se reproduisent. Et les reactions chimiques, meme si elles generent des produits, ne generent pas pour autant la multiplication. Revenons toutefois a nos humains, qui, entre-temps, ont vieilli. Ils accomplissent maintenant ce geste pour la premiere fois dans le but de se perpetuer, avec le seul regret que le mouvement perpetuel n'existe ni dans la physique, ni dans le physique... --< Infame info >-- Voici un petit lexique des mots les plus utilises en informatique, pour le benefice des novice et pour l'hilarite des experimentes. Backslash: Symbole dissuasif visant a decourager le neophyte de s'interesser a l'informatique. Clavier francais: Offensive americaine visant a empecher les francophones de programmer en rendant inaccessible les symboles les plus utiles (dans le but evident de preserver leur monopole). Clavier americain: Offensive americaine visant a empecher les francophones d'ecrire dans leur langue natale pour accelerer leur assimilation. ``Abort, Retry or Fail'': Echelle de notation d'un cours d'informatique. Windows: Tentative echouee d'augmenter la productivite des utilisateurs en rendant les logiciels plus faciles d'utilisation. Le probleme est qu'il y est aussi plus facile de changer la tapisserie du fond de l'ecran, la forme des icones, le type de screen-saver, etc... bref, la productivite diminue. Facilite d'utilisation: Difficulte de programmation. UNIX: Conglomerat de programmeurs fanatiques qui tentent par tous les moyens d'empecher les non-programmeurs de toucher a un ordinateur. MacIntosh: Conglomerat d'utilisateurs qui, en etant tellement exigeants, decouragent tout programmeur d'exercer leur art. Code spaghetti: Caracteristique des programmes datant de la meme epoque que les westerns du meme nom. C: Drogue. Au premier contact, est desagreable. Mais une fois attrapee la piqure des pointe(ur)s, vous ne voudrez plus jamais refaire du BASIC, apres un tel acide. Votre desir de programmer en C s'incrementera toujours si bien qu'il saura orienter l'objet de votre vie vers lui. Pascal: Langage structure utilise dans tous les cours d'initiation a l'informatique mais nul part ailleurs. FORTRAN: Langage non structure presque acceptable grace a vingt ans de patches successives. Utilise partout, sauf dans les cours d'initiation a l'informatique. _istrchr: Nom de fonction typique d'un programme ecrit dans les annees 70. GetFillPolygonIndexTypeContext: Nom de fonction typique d'un programme ecrit dans les annees 90. Nombre de lignes de code: Unite de mesure de la longueur d'un programme poussant inutilement les programmeurs a ecrire des programmes aeres. Commentaires: Sans commentaires... Boucle: Voir boucle. Appel de procedure: Voir ``Initiation au Pascal'', chapitre 1. Infini: Valeur qu'un programmeur s'empresse de remplacer par 5, 100, 1000 ou, dans le pire des cas, 1E+38. Imprimante rapide: Distributrice de papier essuie-tout. Interface graphique: Obligation pour le programmeur d'ecrire le mot ``window'' dix fois par ligne: Window *mywindow=new window(hWnd, windowtype.wnd, WND_WINDOWED_WINDOW). : Quit, end, exit, bye, logoff, break, ^C, escape, F7 n o, alt-X, ctrl-alt-delete, ctrl-alt-backspace, ^D, ^Z: Signe que ce texte est fini! --< Un Noel traditionnel >-- Les murs en agglomere cachaient a peine l'isolant rose du chalet de ski qui nous servit de lieu de rencontre pour feter Noel. L'eclairage neonne de la piece principale laissa heureusement place a la lueur de la chandelle, une fois le repas arrive. Mais cela n'attenua pas pour autant l'eclatante lueur de l'enseigne Coka Cola qu'arborait fierement le comptoir du snack-bar a peine dissimule par l'entassement de manteaux produit par l'absence de vestiaire et la particuliere efficacite de l'isolant rose deja evoque plus haut. Les meilleurs succes de Noel de tous les temps jouaient sur la chaine stereo apportee sur les lieux pour les egayer (les lieux, pas les gens). Le charme de cette musique venait du rythme lascif de la lambada qui accompagnait ces musiques traditionnelles, le tout joue, bien entendu, avec un orgue electronique de la plus insupportable espece. Ah oui, nous en etions au repas, avant que je me sois laisse emporter par mon ardeur poetique. Grand-mere, cette annee, en a eu marre de se faire traiter de tous les noms en raison de la remarquable absence de saveur de son repas. Elle fit donc appel a un traiteur (qui en etait un bon et non un mal traiteur). Personne ne prit le soin de lui souligner le changement de gout, non pas pour ne pas la choquer, mais simplement en raison de la remarquable absence de gout de la plupart des gens. Le repas s'amorca par le traditionnel benedicite de Ma-tante, suivit de pres de l'invitation de Mon-oncle a prendre la biere qu'il y avait dans le frigidaire (je devrais dire ``refrigerateur'', mais c'est si payant d'etre commandite). L'on parla. L'on bouffa. L'on fit les deux a la fois. On se comprit quand meme, en gros. On avala quand meme, en gros morceaux. Vint le temps de se resservir. Autant l'ambition personnelle de chacun que la potentielle augmentation du taux de cholesterol transparaissait dans le volume de l'assiette de chacun. (Le premier service avait ete donne par Grand-mere elle-meme, afin d'eviter que Mon-oncle ne se fit exagerement du cholesterol et que la petite niece ne contracte exagerement une rechute d'anorexie.) Quittons un peu ce niveau culinaire pour toucher a la partie intellectuelle du repas. Les blagues fusaient. Les gens riaient. D'autres blagues re-fusaient. D'autres refusaient ces blagues qui devenaient de plus en plus scatologiques et de moins en moins eschatologiques (i.e. moins spirituelles). Puis, la separation inevitable se produisit: les femmes d'un cote, les hommes de l'autre. La couture d'un cote, le hockey de l'autre. Je me trouvai donc seul, n'aimant ni la couture, ni le hockey. Notez que je ne me suis pas ennuye pour autant: je me suis amuse a imaginer ce que vous lisez en ce moment! Soudain, le drame survint: une bouteille de vin bien rouge se renversa sur la nappe bien blanche. Vous imaginez deja ce qui se produisit: ``-il faut mettre du sel... -non, du poivre... -je t'avais dis de faire attention! -peut-etre qu'avec du vinaigre...'' Et bien non: la nappe etait sauve car elle etait confectionnee d'un plastique digne d'un garage en toile, cette affreux appendice qui decore la plupart des maisons urbaines, en hiver. La fin de la soiree persistait a ne pas vouloir arriver quand j'entendis ma mere formuler une excuse particulierement subtile pour justifier un depart premature. Je n'eus point ose faire de meme, mais ce depart me semblait le bienvenu. Une fois bien parti, je me sentis partir et m'endormis. Je ne me reveillai qu'a moitie pour passer du siege de la voiture a mon veritable lit, une fois la maison familiale regagnee. Je me redormis a moitie pour passer la nuit a dormir completement (puisque je ne m'etais reveille qu'a moitie). Une pensee philosophique me traversa alors l'esprit: le sommeil est le plus agreable moment de la vie et c'est dommage d'y etre justement inconscient. Et dire que j'ai du rester conscient pendant tout ce Noel... --< Histoire d'un saoul sans le sou >-- Il etait une fois un chimiste, specialiste en solutions, qui avait un probleme sans solution: il n'etait plus solvable car il ne lui restait que dix sous. Son argent, evidemment, ne s'oxydait pas, mais il se reduisait sans cesse. Potentiellement, des effets tres negatifs pouvait lui arriver: sa situation devenait malcenne. Tout avait commence lorsqu'il s'etait mis a boire. D'abord quelques verres solitaires, puis de plus en plus... au point que ces vers de plus en plus longs provoquerent une cesure dans sa vie. Sa femme le quitta et il se rendit alors compte que, dans l'alcool, le mariage ne restait pas indissoluble. Alors qu'avant, il se la coulait douce, il entrait maintenant dans une phase plus dure car maintenant, les choses se precipitaient. Il eu d'abord des problemes de digestion: des gaz peu nobles. Sa calvitie l'attaqua ensuite de front. Il pensa meme utiliser l'electrolyse inverse des poils pour remedier a la situation. Peut-etre en utilisant du platine comme electrode il parviendrait a devenir blond platine? Et il y avait toujours son probleme de solvabilite qui faisait en sorte qu'il ne puisse plus profiter de ses interets composes. Et quand un chimiste perd son interet pour les composes, il n'est plus dans son element. N'etant plus tres efficace a son travail, il etait a la merci de son patron, qui le remercia d'ailleurs. Et ce n'est pas une mise a pied qui le remettra sur pied! Bref, il souffrait, il vulcanisait meme, de rage: je suis gradue (comme le cylindre du meme nom), je suis donc en mesure d'accomplir ma tache, que ma reputation soit tachee ou pas. Comment allait-il se tirer de cette situation eprouvette (pardon, eprouvante) et qui lui coutait becher? (Note de l'auteur: je vous avoue que pour le moment, je n'en sais rien.) Puis soudain, la loi de Murphy intervint. (La loi de Murphy prevoit que si quelque chose de nefaste a une probabilite nulle de se produire, elle se produira quand meme, juste pour nous embeter.) Cette fois-ci, cependant, la loi de Murphy intervint sur elle-meme avant de frapper. Ce que l'on appelle la Providence est en realite un phenomene de Murphy au second degre. Enfin bref, la Providence visa dans le mille et lui fit gagner le million. Lorsqu'on a des billets de mille, on n'a plus besoin de vin(gt), et son alcoolisme disparut aussitot. Cupidon frappa aussi dans le mille de maniere a ce que le couple, de nouveau reuni par je ne sais quelle force etrange mais capital(e), puisse se remarier et avoir beaucoup d'enfants pour que ce conte (maintenant approvisionne) se termine dans le meme ton que dans lequel il avait commence (``Il etait une fois...''). --< Paroliers parodies >-- Imaginez ce que chanteraient quelques-unes des grandes celebrites de la chanson si elles passaient une journee avec un etudiant universitaire typique. Au leve penible du matin, Francis Cabrel aurait chante, sur l'air de ``Je l'aime a mourir'': Moi je dormais bien, Mais voila qu'aujourd'hui Il ne reste plus rien du sommeil de mes nuits Je vais m'endormir, je vais m'endormir, je vais m'endormir. En attendant l'autobus, en plein hivers, sur le chemin de l'ecole, Richard Seguin entonnerait, sur l'air de ``Journee d'Amerique'': 'Y fait froid, Y'e gele. Y'a ses orteils qui brulent Au fond de ses bottines. Y'est deja pas tout nu Y'a meme du linge en surplus. C'est vraiment pas ici L'beau temps Pis les vacances au soleil: Un terminus pareil! En arrivant dans une salle de cours presque vide, le groupe Harmonium aurait fredonne: Ou est passe tout ce monde Qui avaient paye leur scolarite? On s'inscrit a ce cours immonde. On devrait peut-etre l'ecouter. A la remise d'un examen particulierement mal reussi, Felix Leclerc aurait change les paroles de ``C'etait un p'tit bonheur'': C'etait le correcteur Qui m'avait ramasse J'etais tout en pleurs Sur le bord d'echouer Une fois le vendredi soir venu, Renaud aurait trouve le moyen de se divertir sur l'air de ``C'est pas l'homme qui prend la mer'': C'est pas l'homme qui prend la biere, C'est la biere que prend l'homme. Tatataaa! Moi la biere, elle m'a pris, J'me souviens, Plus de rien. Le quotidien n'affecte bien sur pas seulement les etudiants du baccalaureat. Combien d'etudiants a la maitrise ne se sont pas dit un jour, sur un air de Paul Piche: Y faut changer d'maitrise mon joooo! En guise de conclusion, Gilles Vigneau n'aurait pu s'empecher de vociferer: La Poly(Note: Abreviation de ``Ecole Polytechnique'' et non de ``polyvalente''.), ce n'est pas la Poly, c'est l'enfer! --< Incident au Dieu >-- Boum! ``-Que fais-tu, mon fils? -Rien, je jouais avec un petard. -Ah, ah, je t'ai pris en deflagrant delit! C'est l'etincelle qui me met le feu aux... poudres. Tu sais que tu es fou. Avec un pareil coup de canon, tu aurais pu te canoniser, sainte! -Eh! le Pere, ne t'eternise pas la-dessus. Mais comment as-tu fais pour savoir que je jouais avec ca ici? -C'est le voisin d'en dessous qui a vendu la meche. -C'est aussi lui qui m'a vendu les petards...'' Le Pere ne put s'empecher de penser: ``Oh! le petit diable, avec lui, on Satan a tout.'' Le Pere poursuivit son sermon: ``-Mais voyons, mon ange, qu'est-ce qui t'a pris et qui t'a appris ca? Tu t'exposes a une serieuse punition. -Je m'explose a une serieuse munition? -Assez rit. Je me crucifie pour ton bien et c'est tout ce que tu trouves a me repondre? -En passant, c'est moi qui me crucifie pour toi. -Ca va, tu as raison. Cependant n'oublie pas que je me suis plie en quatre et separe en trois pour toi. Mon fils, tu n'es pas Saint d'Esprit. -Pourtant, Maman m'aurait permis de le faire. -Ne me parle pas de ta mere Lucie. Je la considerais comme une deesse... jusqu'a temps qu'elle parte avec je ne sais quel Apollon.'' Voyant qu'il n'avait pas trouve le juste argument, le fils etouffa l'affaire: ``Arrete de t'enfer. Laisse Lucie faire!'' Puis vint le moment d'annoncer le chatiment: ``-J'ai une bonne et une mauvaise nouvelle pour toi. Par laquelle commence-je? -Par la mauvaise. -Tu n'auras pas de desert pendant quarante jours. Les fruits: interdits. Tu n'auras pas le choix de manger tes restes. Si tu veux rester au paradis: tes restes!'' ``Et la bonne nouvelle?'' de demander le fils, timidement. ``-Ca, ce sera pour plus tard...'' Contrairement a toute esperance de la part du fils, le sermon n'etait pas termine. ``-Il faut jouer a autre chose si tu veux evoluer... -Je pensais qu'il ne fallait pas parler d'evolution... -Non bien sur. Toutefois il faut penser a ton ascension... dans la societe. J'espere que tu n'iras quand meme pas a l'Ecole Pyrotechnique! -Pourquoi pas? -Tu n'etudieras pas cette science tant que t'es au logis! -Je m'en vais, alors. Je saurai trouver de l'argent pour vivre. Je pecherai capitaux ailleurs. -Je ne suis plus a la hauteur pour t'elever. Je ne peux plus rien faire pour toi sinon que de te renier et de te rayer de mon testament. -J'en ecrirai un deuxieme, juste pour moi!'' Et Dieu, longtemps, bouddha. Curieusement, le concept d'explosion, plus que son propre fils, l'avait ebranle: cela lui avait donne une idee pour sa toute nouvelle creation. La recette etait simple: Mettre ensemble un grand nombre de particules. ``Elementaire!'', se dit-il. Faire exploser le tout. ``Ca n'a rien detonnant!'' Laisser reposer quelques milliards d'annees. ``Pas de probleme, j'ai une eternite devant moi!'' C'est ainsi que le Big-Bang prit forme. Puis Dieu, patient, scruta le resultat. ``Cinq milliards d'annees et toujours rien. Dix milliards d'annees: j'attends encore cinq milliards d'annees et j'arrete.'' Et c'est a ce moment que son fils le surprit: ``-Ah, ah, toi aussi tu joues avec le feu! -Entre ta recreation et ma creation, il y a un monde! Et puis regarde, de toute facon, ca ne donne rien: meme apres quinze milliards d'annees, il y a toujours 99,9% des debris qui sont dans le desordre le plus complet. Alors zou!, assez perdu de temps, on ramasse le tout et on n'en parle plus.'' Comment aurait-il pu voir que sur un des minuscules debris, la vie avait apparu? La vie, il ne la vit point. Si seulement il lui avait demande son avis, a la vie. Elle aurait surement dit: ``priere de m'ecouter.'' --< La malchance a-t-elle plus de chances d'arriver que la chance? >-- Nous connaissons tous la loi de Murphy qui predit que si quelque chose d'indesirable a une probabilite nulle de se produire, elle se produira quand meme. Cette loi fut decouverte empiriquement (d'ailleurs elle empire a chaque fois qu'on la constate) et il ne lui manque qu'un brin de formalisme theorique pour la promouvoir au rang de veritable loi scientifique. Commencons par decrire le champ de Murphy, note ``mu'' (plutot que ``M'', pour faire plus serieux). Il est genere par une particule elementaire, le murphino, totalement indetectable (en vertu de la loi de Murphy elle-meme). Les murphinos sont partout: il y en a des milliards par mm^3. Ils pourraient meme resoudre l'enigme de la masse manquante de l'univers. En plus de son effet sur les humains, le champ de Murphy est responsable de la plupart des phenomenes etranges de la physique des particules. Pourquoi ne peut-on pas connaitre a la fois la quantite de mouvement et la position d'une particule avec toute la precision que l'on veut? Pourquoi une meme entite est-elle a la fois onde et particule? Pourquoi est-il impossible de rassembler les quatre forces de l'univers en une seule? Il fallait bien que la loi de Murphy embete aussi les scientifiques... On voit qu'il suffit d'une seule nouvelle particule pour expliquer tous les phenomenes physiques possibles et imaginables. Si un phenomene suit une loi connue, pas de probleme. Et si le phenomene ne suit pas la loi en question, eh bien, c'est l'interaction de Murphy qui en est responsable. Il est tentant d'essayer de contredire la loi de Murphy par l'objection suivante: ``En principe, la malchance totale de l'univers (notee aussi ``mu'' pour nous compliquer la vie) est constante: le malheur des uns fait le bonheur des autres.'' C'est que la malchance tend a se rassembler chez les etre conscients et la chance, dans la matiere inerte, sous une forme peu disponible. On appelle anthropie (contraction du mot anthropophobie) cette tendance qu'a la chance de s'enfuir des hommes. Ainsi, si vous frappez sur un mur, vous aurez mal; le mur, non. De meme, dans toute autre situation ou un etre conscient et un etre non conscient interagissent, l'etre conscient subira toujours un maximum de desagrement. La loi de Murphy est donc un critere universel qui permet de definir ce qu'est la conscience. Si la plupart des humains ont une tendance similaire a accumuler la malchance, il existe des gens chez qui le phenomene est particulierement prononce: on les appelle des newfies. La nomenclature varie cependant selon le pays: les Francais les appellent des Belges, les Belges des Suisses, les Suisses des Francais, etc... Que voulez-vous: nul n'est newfie dans son pays. Je me propose maintenant d'eclaircir certains paradoxes qui se presentent lors de l'etude de la loi de Murphy. Considerons le cas de deux personnes qui appliquent pour le meme emploi. Pour chacune de ces personnes, la loi de Murphy devrait faire en sorte que cette personne n'obtienne pas l'emploi. Pourtant, une de ces deux personnes obtiendra necessairement l'emploi et pour elle, la loi de Murphy sera violee. Une erreur s'est glissee dans ce raisonnement: nous avons fixe arbitrairement une mise en situation. Or, la loi de Murphy s'applique egalement lors du choix des conditions initiales. Il est impossible que seulement deux personnes ne postulent: quand un poste s'ouvre, ce sont 100 personnes qui se precipitent pour l'obtenir. Et de ces 100 personnes, 99 seront frustrees alors qu'une seule sera heureuse. La loi de Murphy aura donc malgre tout maximise la frustration totale de l'univers. Mais, me direz vous, pour la personne qui a eu l'emploi, la loi de Murphy aura tout de meme ete violee. Ne vous inquietez pas, elle le perdra bientot, son emploi! Voici un autre exemple qui montre l'emprise de la loi de Murphy sur la fatalite. Imaginez que vous etes a la recherche d'un objet. Avez-vous remarque que c'est toujours au dernier endroit ou vous regardez que vous le trouvez? Il semble facile de contourner la loi de Murphy dans ce cas: il suffit de continuer a chercher, meme apres avoir trouve l'objet. On ne trouverait alors plus l'objet au dernier endroit ou on a cherche et la fatidique loi serait violee. On aura cependant encore perdu plus de temps. Donc, cette loi de la frustration universelle est vraiment inevitable. Et si jamais on trouve l'objet au premier endroit ou on le cherche, n'a-t-on pas viole la loi de Murphy? Non, puisque si vous le trouvez au premier endroit qui vous vient a l'esprit, c'est que vous ne le cherchiez pas: vous saviez ou il etait. En conclusion, grace a la loi de Murphy, on peut definir la notion de ``conscience'', expliquer l'incroyable constance de la malchance humaine et, accessoirement, resoudre tous les problemes de la physique actuelle. --< La cour, c'est long... >-- Les poursuites, de nos jours, ca court les rues. Ca court aussi dans les cours. Avant, les criminels s'enfuyaient a la course et se faisaient poursuivre dans la rue. Ils s'y faisaient arreter pour ensuite se faire trainer a la cour pour qu'on y poursuive la poursuite. Maintenant, il n'y a pas seulement ceux qui se font arreter qui se font poursuivre. Il y en a qui se font poursuivre et qui n'ont pas couru apres! C'est le cas des poursuites en dommages et interets. On les appelle ainsi parce que c'est dommage pour un des partis et tout un interet pour l'autre. Ces procedures sont toutefois extremement complexes. On ne choisit pas toujours la maniere la plus judicieuse de proceder, mais toujours la plus judiciaire. Premiere complication: le commun des mortels ne parle pas le meme langage que les hommes de loi. C'est pourquoi la plainte doit d'abord etre traduite en justice. En francais, la plainte ne fait que quelques pages, tandis qu'en justice, elle en prend vingt. C'est que les juristes sont prudents, jurisprudence oblige. Deuxieme complication: les gens de la cour doivent suivre des regles vestimentaires strictes. Chacun doit s'habiller en bon uniforme. Les lois etant fort compliquees, les avocats et les juges risquent de s'arracher les cheveux. C'est pourquoi la perruque fut longtemps de rigueur. Maintenant que la mode est passee, on se retrouve avec 90% des hommes de loi chauves. Quand aux femmes de loi, elles ont l'obligation quasi constitutionnelle de porter la jupe. Encore heureux que le voile ne soit pas incorpore a la tenue de travail: le voile incorporatif a deja ete leve. Et tout ce beau monde joue le jeu: le jeu de l'oie. Les juges pestent contre le nouveau code si vil. Et les avocats font valoir le fruit (l'avocat) de leur travail. Ils essaient d'etre des avocats de l'enfer, des avocats du diable. Parfois ils tombent dans des impasses, mais il faut continuer coute que coute. Et ca coute, et ca coute... Les procedures ne sont coupees qu'une fois le coupable trouve. Et alors le parti perdant crie tres fort son mecontentement. Et pour etre sur d'etre entendu, il fait appel. Il ne sait pas si ca marchera: il essaie, juste pourvoi. Et le ton monte, monte. La cour aussi doit monter. Le juge crie: ``la cour est levee!'' et on passe en cour superieure. C'est ainsi que les causes occupent autant les cours supremes que les basses-cours (on distingue les cours supremes des basses-cours par le fait que les poulets y sont plus rares). Il y a tellement de causes en cours en cour que meme apres des annees sur la meme cause, on cause toujours, sans qu'il n'y ait d'effet! On cherche encore le fameux lien de causalite. Mais une fois la cause alitee, l'affaire dort. Et les jures, ces gens comme vous et moi, ils essaient d'y comprendre quelque chose pour decider du sort de l'accuse au pied du mur. Et ca les fait jurer... --< Desaccord majeur >-- Ayant pris une grosse brosse, il se dit ``ca me donne mal au cheveux... la prochaine fois, je prendrai un peigne!''. Et sa tete ivre continuait de divaguer: ``Je deviens spirituel quand je prends des spiritueux''. Mais il devait encore arriver a rentrer chez lui, alors que la musique resonnait encore dans sa tete et que sa tete, elle, ne raisonnait plus du tout. Ayant perdu sa clef sur le sol, ce fat dut defoncer l'armature de la port(e)e. Mais en faisant cela, il se retrouva sur le do, la, sur le sol cire. Il eut fallu qu'il mesure la portee de cet acte: sa femme fut prise d'une peur blues, tandis qu'elle jazzait au telephone dans la piece d'a cote. Le mari s'informa: ``T'es be mol, je t'ai fait peur?''. ``Diese-moi pas'', dit-elle, d'un rhume agonisant. ``He, ma noire, pourquoi tu me regardes croche de meme'', s'ecria-t-il, tout en subissant la judicieuse remarque de sa femme: ``Si j'etais ronde comme toi, je te verrais double croche...''. Inutile de preciser qu'ils s'accordaient mal ensemble: c'etait un battement continuel. Et vous devriez voir leurs figures, lors de ces interferences! Et tranquillement, le ton montait... jusqu'a donner une note tragique a la situation. Le poissonnier d'en face, ayant remarque que le thon a varie, pecha par exces d'altruite, et se mela a l'affaire. Pour attirer l'attention, il simula une quinte de toux. ``-E-quarte toi'', cria la femme, ``je ne veux pas de tierce personne dans cette histoire. -Soit, je m'en vais, mais laissez-moi au moins dormir. -Une seconde, dit Octave (c'etait le nom du mari), reste ici, sinon je vais manger un coup. -Bah, c'est ton probleme: apres avoir bu un coup, tu peux t'attendre a en manger un!''. Sur ces mots, le poissonnier les laissa a leurs deboires (et sur leur faim). A ce moment-ci, l'auteur de cette histoire a plusieurs choix pour la terminer. Il peut en faire: un drame (l'homme se met a battre sa femme); une comedie (la femme se met a battre son mari); un roman savon (ils s'embrassent et tout finit bien); un conte (tout finit tellement bien qu'ils ont beaucoup d'enfants); une tragedie grecque (Dieu intervient et part avec la femme, qu'il trouve de son gout); un tele-roman quebecois (ils s'assoient et prennent un cafe (tout en discutant de banalites)); un tele-roman americain (ils sortent leurs Jaguar de leur garage triple, passent a cote de la piscine, vont dans un restaurant francais ou l'on parle anglais, prennent un whisky et... discutent des memes banalites); un texte d'Axel van de Walle (ils se mettent a boire tout les deux et commencent a faire des jeux de mots que personne ne comprend a jeun et que personne ne comprend sous l'effet de l'alcool non plus, mais dont on rit au moins). --< Informatique informelle >-- Une formation en informatique reste informe si on ne vous informe de ces quelques definitions formees d'informelles informations. Souris: dispositif ingenieux permettant simultanement de nuire a ceux qui tapent vite a la machine et de permettre a ceux qui n'utilisaient pas l'ordinateur de le faire, nuisant ainsi encore plus a ceux qui tapent vite. Inflation: processus inevitable qui fait en sorte que le nombre de disquette necessaire pour installer la nouvelle version d'un logiciel double a chaque annee, meme si la capacite des disquette double elle aussi. La vitesse de l'ordinateur doit aussi doubler a chaque annee pour pouvoir executer ladite version du logiciel sans doubler la consommation de cafe de l'utilisateur. ``Basic extinct'': Film mettant en vedette un langage informatique. Il meurt a la fin. Serveur (de reseau): S'il travaillait dans un restaurant son patron lui dirait: ``ne reste pas plante la a ne rien faire''. Fenetre: Concept ingenieux visant a sous-utiliser la surface de l'ecran de maniere a stimuler la vente de moniteurs de plus en plus gros. Numero de version: Quantite proportionnelle a la complexite d'un programme et/ou au nombre de bugs presents dans la premiere version. Icone: Future cause de l'illettrisme. Manuel d'utilisation: (Voir: non utilisation du manuel.) Commande UNIX: Phoneme de deux consonnes, generalement imprononcable. Commande par souris: Phoneme du langage des signes, generalement imprononcable. Virtuel: Mot virtuellement partout present, voulant dire virtuellement n'importe quoi, mais se vendant reellement bien. Standard: Ce que toutes les compagnies devraient suivre. C'est ce qu'elles ont fait: elles suivent toutes leur propre standard. Assembleur: Derniere etape avant de commencer a desassembler son ordinateur. Architecture parallele: Type d'architecture ne se fabriquant pas encore en serie. Ordinateur: Dispositif permettant d'economiser sur une seule chose: le chauffage. Electronique digitale: Technologie fondee sur l'utilisation des doigts (pour enfoncer des touches). Goto: Voir 1979. --< L'Idole >-- Je suis un etre desire par tous... et j'en ai marre, depuis le temps que ca dure. Au debut, j'etais sur qu l'on m'aimait pour mon argent. Or, un jour, je l'ai perdu cet argent. Mais j'ai garde toutes mes valeurs humaines: c'est imprime sur ma face. Ces valeurs ne s'en iront jamais, ce sont des valeurs immobiles hier, immobiles demain. C'est pourquoi les gens ont garde tout leur interet pour moi. On m'admire, comme si j'etais un comte celebre et noble. J'ai compris: on m'aime pour mes papiers: pour mon image noble, plutot que pour mon metal noble. Meme a l'epicerie, on accourt vers moi, si bien que je dois continuellement m'enfuir. Et ce n'est pas monnaie courante de voir un comte courant en faisant son marche. Bref, on court, on saute, on vole meme, pour m'avoir. Je suis partout reconnu: on me regarde sans cesse. Meme quand je suis rond et meconnaissable, on me regarde de billet. Parfois, pour me cacher, je me donne un air americain. Helas, ca ne fait qu'augmenter mon succes. Alors j'essaie toutes sortes d'habits pour me dissimuler: inutile de dire que mon taux de change est tres eleve et que mes mesures protectionnistes ne sont pas efficaces. Bien que l'on me desire ardemment, cela ne veut pas dire que l'on veuille me garder. Ainsi, a peine ai-je trouve l'ame soeur, qu'elle veut deja se debarrasser de mon etre et m'echanger pour un bien meilleur. Inutile de dire que je n'aime pas ce truc (ni ce troc). D'autre fois, on a honte de sortir avec moi et on me cache. Je blanchis de peur a cette idee. Vraiment, on se paie ma tete. A peine me suis-je tire de ces situations d'un ridicule bien consomme, que je retrouve a nouveau la gloire: l'on est suspendu a mes levres, l'on prend tout ce que je dis pour du cash. Des que je m'exprime, je m'imprime dans la memoire des gens. Toutes mes conferences sont a guichet ferme, c'est automatique. Je suis presque partout en meme temps, comme Dieu. Je suis seulement un peu plus materiel, voire meme materialiste. Mais il y a trop d'action dans ma vie, cela me donne trop d'obligations, comme sur le marche boursier. La bourse ou ma vie, c'est la meme chose, tellement je suis occupe. Je suis en pleine crise et comique n'est pas ma situation. Je vais craquer, faire un krach et tout ce que vous voudrez. Je veux rester seul chez moi, en bas. Je veux retrouver les fonds de caves tranquilles que j'avais perdus de vue. Laissez-moi seul a mes fonds, meme sans provisions. Epargnez-moi, un peu, c'est capital pour moi. Je veux etre seul dans ma tour d'ivoire a me faire de la corne sous les pieds en tournant un rond, en pensant, afin d'ivoire plus clair. Ma seule consolation, je vous l'ai deja dite: on ne m'aime pas pour mes dollars, au moins. C'est normal, je suis le dollar! --< Comment ne pas (ap)prendre le champ en chantant >-- S'il est desirable d'avoir du talent pour se lancer dans la chanson, cela n'en est pas pour autant essentiel. L'argent est un excellent substitut. Bref, il ne faut pas etre deja dans le trou pour percer. Et une fois lance, les retombees sont interessantes: il suffit de tomber au bon moment. Il existe deux methodes pour percer. Ou bien vous vous astreignez a jouer dix ans dans les bars pour vous faire un nom, ou bien vous demandez a un producteur de vous en faire un. Dans ce deuxieme cas, votre succes sera peut-etre de courte duree, mais rien ne vous empeche d'effectuer un retour sur scene dans vingt ans, lorsque l'industrie du disque sera encore plus lucrative qu'aujourd'hui et que votre nom sera devenu un mythe du passe lointain. En parlant de nom, votre nom d'artiste doit etre le plus insolite possible: ca vous fera au moins une chose a raconter en entrevue. Ayant tout depense a la promotion, il ne vous restera probablement plus d'argent pour payer des musiciens, d'ou l'utilite des instruments electroniques qui, malgre un fort cout d'achat, ne demandent pas d'augmentation de salaire par la suite. Ces instruments ont en plus l'avantage de ne pas developper de complexe d'inferiorite vis-a-vis le chanteur, lui qui recolte habituellement le plus de succes (et on se demande souvent pourquoi). Si a ce moment vous vous rendez compte que vous n'avez pas de voix, de multiples effets speciaux electroniques vous ouvriront quand meme la voie. Autre alternative: trouvez au moins une note que vous etes capable de chanter et n'utilisez que celle-la. Apres tout, meme en excluant le rap, 50% des chanteurs populaires chantent la meme note 50% du temps. Si vous n'arrivez quand meme pas a chanter, vous pouvez toujours engager quelqu'un pour chanter a votre place: l'important est d'etre beau et de savoir faire de la post-synchronisation. Si, a l'oppose, vous etes laid, vous pouvez engager un mannequin et vous, chanter. Et si, par un malheureux hasard, vous etes laid et incapable de chanter, vous pouvez engager les deux et on vous appellera dorenavant ``producteur''. Bref, il y a de multiples manieres d'arriver au succes quelle que soit la nature de votre absence de talent. Une fois le succes obtenu, il ne vous restera qu'un obstacle a affronter: les humoristes, qui ne demandent pas mieux que d'avoir une nouvelle personnalite comme cible. Et en tant que personne alitee, vous ne dormirez jamais sur vos deux oreilles. --< Re-Creation informatique >-- Le premier jour, Dieu crea l'ROM. Et pour ne pas que ce MEG soit tout seul, il inventa la RAM, tres estatique, qui le rendrait plus dynamique. Mais l'ROM avait parfois de la difficulte a la suivre: ``tu te cache(s)'', lui disait-il souvent, ``... et plus vite meme que mon ombre, la shadow ROM''. Pour lui faire connaitre les plaisirs de la vie, la RAM lui donna une Apple. Il souris, en lui disant: ``Je t'admire, comme une icone''. Tandis que l'ROM contemplait les courbes de la RAM, Dieu leur dit: ``je permets que vous bezier. Mais n'inscrivez pas cela dans des livres, ou ils seront proscripts, comme ce fameux livre qui parle du spline (Les Fleurs du mal de Baudelaire).'' Dieu annonca ensuite a tous les logiciels de la terre: ``allez, et multipliez-vous.'' ``Oups!'', se dit-il, ``je n'aurais pas du dire ca!''. Puis il se rendit a l'evidence: ``Bah, je n'ai qu'a inventer les virus: ce n'est pas la premiere fois que je pense a ce truc.'' Ensuite, Dieu laissa les choses aller, pour quelques temps. Il avait toutefois surestime la bonte de l'humanite: elle avait eu le temps d'instaurer plein de systemes d'exploitation qui se servaient d'unites centrales de maltraitement pour executer les programmes. Il etait temps que Dieu intervienne: il divulgua les dix COMMAND.COM (nous n'en sommes encore qu'au sixieme, mais...): Sois convivial avec le prochain. Conduis-toi bien (grace au driver approprie). Prends de bonnes resolutions, comme Hercule l'a fait. Tu ne te detourneras pas vers LABEL de ton voisin (meme si elle a des belles boucles). Tu ne taperas pas ``format c:'', etc. Et n'oubliez pas que, tout comme dans une memoire-pile, les derniers seront les premiers, au logi-ciel. De nombreux fideles se chargerent de repandre la bonne nouvelle. Ils distribuerent des tracks dans tout le secteur. Ils prierent la vierge floppy (au teint immacule et fort mat) de les aider dans leur sauvegarde de l'ame. Ils furent impressionnes par l'indifference des gens: ``mais, vous vous en fichier, ma parole''. Bref, l'effet fut mal calcule, et ce fut un mega-flop. Rien a faire, Dieu devait a nouveau intervenir: il envoya son propre fils, a ses RISC, pour accelerer l'instruction de ses fideles. Ce fils rassembla tout le monde a la BAS(IL)IC (il etait un bon assembleur), pour leur parler. Il fut cependant mal interprete (comme tout BASIC qui se respecte) car il s'exprimait toujours au second degre (en paraboles) plutot que d'y allez adroitement en ligne droite. Tandis qu'il leur parlait du cierge Pascal (en se disant qu'il brulait tellement mal qu'il aurait du prendre un cierge Turbo Pascal, Borland beaucoup mieux), il s'arreta. En voyant que personne ne l'ecoutait, il se planta devant la foule (ce n'etait pas au programme), muet. On entendait les bugs voler. Sa colere l'avait FORTRANsfigure. ``C'en est trop! Je retourne chez ma mere... ee, chez mon pere'', s'ecria-t-il, ``vous n'avez pas clique avec l'Apple, ni avec les dix COMMAND.COM. Vous serez donc condamnes a communiquer avec le logi-ciel par le pire des interfaces utilisateurs: la priere''. --< Geologue en monologue >-- Pendant toute ma vie, j'ai vecu dans le rush... et dans la roche. Au primaire, j'ai commence ma formation. Cette formation, c'etait une montagne pour moi. Au secondaire, j'avais le front plisse et le visage errode de mon incomprehension profonde. Inutile de vous dire que je n'ai ensuite jamais ete au terciaire, ni au quaternaire, d'ailleurs. Ca a tout pris pour que j'evolue, que je sorte des jupes de la mer pour devenir enfin terre a terre et marcher de mes propres jambes. (Ce n'est que plusieurs millions d'annees plus tard que j'ai su voler de mes propres ailes.) Heureusement, mon nom (Pierre, evidemment) me destinait un meilleur sort: une carriere de pierre, la geologie. J'ai attaque le noyau de mes problemes manteau pour sortir de mes croutes. Depuis lors, je dresse mon epine dorsale, meme si ca me pele! Je dresse ma dorsale, meme si ca m'archi-pele. Ca n'en prenait pas plus pour faire irruption sur le marche du travail. Puis j'ai rencontre cette en-glaise, fort argile, ce qui est normal puisqu'elle venait d'une terre tres cultivee. L'Angleterre n'est pas une terre arabe me direz-vous, mais peu-importe. Cette anglaise etait cependant tres prude: un simple affleurement et, pfouit!, enfouie qu'elle etait, cette pierre precieuse. ``Shiste'', me disais-je alors, ``faut-il se resigner a vivre un amour plaque tectonique?''. Notre geologue essayait par tous les moyens de la seduire. De nombreuses fois, il s'inclinal devant elle mais ca ne lui fit pas un pli. Il y avait vraiment une faille dans sa methode, mais heureusement il avait aussi de la veine! -Ah, si l'humanite est une roche sedimentaire, nous faisons vraiment partie de la meme couche. -Comment, tu veux qu'ensemble l'on couche? -Non, je ne fais pas alluvion au lit (de la riviere)... -Sedi-menteur! -Ne pepite pas tant, laisse-toi reposer, car au fond se deposera l'or (poetique, non?). -Decante! (Decampe?) -Si je devais m'enfouir, ca me minerai mon moral. Tu es celle que gemme. -Et bien, filon ensemble... Lorsque deux jeunes gens continents se rencontrent et que la subduction opere aussi vite, c'est qu'il aura rapprochement rapide des continents et que l'amour plaque tectonique ne durera pas tres longtemps. Bon, je passe outre le bloc erratique du texte: ce bloc serait deplace et j'aurais peur que vous vous glacier. Retrouvons donc notre geologue dix ans plus tard, ce qui est tres court, geologiquement parlant. Il est maintenant dirigeant d'un grand conglomerat de compagnies et peut, a son gres, se consacrer a ses loisirs favoris. J'ai ainsi amene ma Pierre au sommet de la montagne. Je ne pensais pas, cependant, que le retour au bas de la montagne serait si rapide et si decisif (ou de Sisyphe). Je devais mourir, peu apres, d'une pierre... au rein. --< Cultures Bacteriennes >-- Il arrive assez souvent dans le monde que deux cultures ne se digerent pas, autant au sens propre qu'au sens figure. En effet, certains se battent pour leur foie (bref, il se font de la bile pour leur foie). D'autres cherchent a ajouter une appendice a leur pays, n'hesitant pas a utiliser des vehicules biliaire. Et d'autres, enfin (en faim?), se battent pour leur langue, et dieu sait si ca fait une belle luette qu'ils le font. Le tout se complique quand un pays a a sa tete un roi qui ne fait qu'a sa tete, qu'il a d'ailleurs assez enflee. Mentionnons l'empereur Mucus, a qui les epices monterent au nez au point d'en devenir fort morveux, d'ou son nom. Rappelons qu'il a su, duodenum-minations, passer d'un destin grele a intestin ascendant: celui d'empereur. Une fois porte-parole du pays, un tel dictateur peut se faire construire un palais (pas laid du tout) d'ou il ne bouche pas, et dent lequel il goute a tous les plaisirs de la vie. Et a celui qui levre la voix, il n'a qu'a crier ``en joue!'' pour qu'il avale sa salive: il reussit de cette maniere a faire avaler n'importe quoi a la population. Mais ce tyroide veut que sont corps politique croisse et pour cela, il doit manger le pays voisin, souvent estomaque d'une telle attaque soudaine. Parfois l'attaque est plus insidieuse cependant: il utilise les glandes agences secretes pour infiltrer les organismes vitaux du corps politique etranger. Il y a parfois des defenses immilitaires contre de tels intrus et l'usage de la force des anti-corps politiques reste alors son seul choix. Le tout se complique aussi lorsque le pays abrite d'anciens colons: intestin plus tragique les attend alors. Indigeste et colon, se font alors chier mutuellement (si vous me passez l'expression), ce qui degenere en d'interminables luttes intestinales. De nombreux exemples en restent encore dans les annales. Et les cultures se battent, comme si elles etaient des cultures plus bacteriennes qu'humaines. L'Histoire est remplie de ces batailles dont l'issue habituelle montre, helas, qu'une culture etrangere, comme un aliment, semble inevitablement destinee a etre assimilee ou renvoyee. --< Les predic-acteurs >-- Les gens, de nos jours, ne sont plus croyants... c'est incroyable. Il n'ont la foi qu'une fois par an (a Noel). Il y a quelques annees, je faisais du porte a porte pour faire adherer les gens a ma toute nouvelle religion. Mais il n'adheraient pas, ils me disaient ``decolle!''. Or un jour, je suis tombe sur un americain... dans tous ses Etats. Il m'a dit: ``vous me dites de louer Dieu, ca ne serait pas plus economique de l'acheter?''. Pour moi qui etait deja un illumine ce flash m'eblouit completement. A nous deux, nous avons realise un libre-echange d'idees... et cela a abouti a une toute nouvelle religion. Je devais toucher les gens au plus profond d'eux-memes (au portefeuille, par exemple). Maintenant, j'ai compris: des que je parle de foie, ca rate! In testin tragique! Et quand j'annonce le cout des dons, je me fait dire: ``coudonc!'' Alors maintenant, je precise que ``ces dons sont deductibles d'impot. Plus que vous me donnez, plus vous sauvez... et plus vous serez sauves. Apres tout, un petit millier de dollars pour assurer toute votre eternite, ca ne revient pas cher de l'heure!'' Vous allez me demander ce que je fais avec les dons? Je me charge moi-meme de leur gestion. Je dis ``gestion'' parce que les dons sont un peu manges. Bref, grace a ce coup de marketing, de plus en plus de gens croient en ma religion. Et plus la population croit en ma religion, plus ma religion croit en popularite. Evidemment, ca m'oblige a faire des apparitions... en public. Des apparitions, enfin, facon de parler, je ne suis pas capable de descendre du ciel. Je ne sais pas comment il fait Lui... Non mais j'ai quand meme des pouvoirs: croyez-le ou non, je suis un medium. J'ai des pouvoirs mediatiques. Je ne suis pas un medium extraordinaire: un medium moyen seulement. Quand j'essaie de faire plier une cuillere, ca ne lui fait pas un pli. Je vous avoue que c'est decourageant: un medium qui rate son coup est un medium bien cuit. C'est un proverbe azteque (a steak?). Mes disciples ne viennent pas vraiment me voir pour mes pouvoirs, mais surtout pour mes sermons. Voyez-vous, j'ai modernise la religion un petit peu. Par exemple, le monde n'a pas ete cree en six jours... Mais bien en quarante heures, pas plus: tout le monde a droit a des heures de travail raisonnables. Devant cette foule hysterique, je presente mes volontes les plus profondes: ``il faut empecher Peladeau de prendre le controle du livret ``Prions en Eglise''. Meme s'il y arrivait, je creerais une autre revue, pour contrer son attaque, qui s'appellerait, non pas le ``Lundi'', mais le ``Dimanche''.'' Mes messages ne passent pas toujours, car il y a parfois des sceptiques dans la salle. Mais je crois qu'au fond d'eux-memes ce sont des faux sceptiques. Alors j'aimerais dire, comme on dit en anglais: ``payez attention''. En francais, on est oblige de dire seulement ``preter une oreille attentive''... quoique le fait que ce soit prete peut peut-etre augmenter l'interet. En tout cas, je n'arrive pas toujours a obtenir l'effet... escompte. (J'avais d'autres jeux de mots dans la meme banque, mais je vous les... epargne.) L'autre jour il y en a un qui m'a dit: ``Vous nous dites que c'est pour notre benefice qu'il faut etre bon en actions, et en intentions, mais on voit bien que votre intention c'est de faire des benefices avec des bonds et des actions.'' J'ai repondu simplement: ``Comme c'est spirituel! Tu veux faire de l'esprit? Tu veux faire ton disciple indiscipline?'' Mais a ce moment, mon inspiration expirait... j'ai donc conclu rapidement ma reponse: ``Non, non, ce n'est pas parce que je t'impose les mains qu'il faut me taxer d'imposteur.'' Il n'etait toujours pas convaincu, c'etait un cas desespere. Alors, pour empecher que ce genre de probleme ne se reproduise, je me suis adresse directement a toute la foule: ``Oui, je sais, il y a des rumeurs qui courent a mon sujet: ne me faites pas marcher, je veux les rattraper.'' Or il s'est avere que ma foule de brebis ne comportait pas trop de moutons noirs. Au moins, mes fideles, eux, ne souilleront pas ma reputation comme le font injustement les medias dans l'immediat. Et j'espere que, pour qu'ils conservent la foi en moi, je n'aurai qu'a leur dire: ``Allez en paix... yant a la sortie.'' --< Songes songes >-- Une nuit qui nuisait a mon sommeil me permit de philosopher un peu. Je vous presente le fruit de cet etat vegetatif. Cela permettra peut-etre a ceux qui doivent quotidiennement trouver des pensees du jour de puiser leurs sources ailleurs que dans La Fontaine. On peut generalement pallier a la blancheur d'une nuit par la noirceur d'un cafe. Dans le but d'uniformiser l'usure des claviers, les ingenieurs se sont sentis obliges d'utiliser la lettre k a toutes les sauces. Dans le but de contrecarrer ce manque d'imagination, ils deciderent par la suite d'utiliser l'alphabet grec en entier (alphabet qui a la particularite de ne pas se trouver sur un clavier, ce qui regle le probleme de l'usure des claviers une fois pour toutes). L'ingenieur aime bien les relations du type y=ax+b+k, ou y=ax+b est la relation theorique et k un facteur empirique donne dans les tables de tout bon handbook d'ingenierie. La qualite d'un repas de cafeteria peut se mesurer par la quantite de sel qu'il faut y ajouter pour le rendre acceptable (procede similaire au titrage d'une base par un acide). S'instruire, c'est apprendre que l'on ne sait pas grand-chose, apres tout. C'est pourquoi, pendant un cours, ce sont toujours ceux qui en savent le plus qui posent le plus de questions. Les seules fonctions integrables a coup sur sont celles obtenues a la suite d'une derivation. La principale utilite de la notation matricielle est de permettre a un professeur de poser des questions tres courtes tout en demandant une enorme quantite de calcul. Une classe reste muette d'incomprehension devant une question du professeur. Ce dernier s'ecrie donc: ``Ne repondez pas tous en meme temps, ca fait des interferences destructives.'' Reflexion sur le capitalisme: Dans un pays ou tout le monde fait ses courses, c'est une economie de marcher. Les gens qui en sont a leur cinquieme mariage ne demandent plus: ``Habitez-vous chez vos parents?'', mais plutot: ``Vos enfants habitent-ils chez vous?'' Avec l'intensite du volume sonore de la musique dans les bars, on ne peut plus reciter des poemes pour seduire l'ame soeur. On doit alors le faire en langage des sourds et muets. Cela a donne naissance a la danse rap. Lorsqu'on me demande si j'ai pense a ecrire un livre, je reponds: ``Mais voyons, des textes comme ca, se serait fou a relier!'' A repliquer a quelqu'un qui se trompe souvent: ``Si c'est en faisant des erreurs que l'on apprend, tu dois en savoir des choses.'' Si quelqu'un vous fait remarquer: ``C'est un coup de chance, ton histoire!'', remettez les choses a leur place en usant de votre erudition: ``Pardon monsieur, c'est un concours de circonstances, et par le fait meme, c'est une circonstance qui a gagne.'' ``Errare humanum est'' signifie ``L'homme erre vers l'est''. C'est pourquoi les newfies sont ce qu'ils sont. J'ai decouvert le sens de l'univers: il est a l'envers. La taxe nous permet de distinguer les drogues legales des drogues illegales: les premieres sont taxees, les autres, non. Je suis un incompris: on ne me comprend tellement pas que je suis un rebus pour la societe. C'est ainsi qu'en reflechissant dans le noir on arrive a faire la lumiere sur certaines choses... --< Un stade pas tres avance >-- Le stade olympique de Montreal, depuis son ouverture, jusqu'a sa couverture, a beaucoup fait parler de lui. S'il eut ete humain, il eut ete tout rouge. Ne l'etant pas, il est t'ouvert. Et il est reste longtemps ouvert: depuis l'epoque antediluvienne a laquelle il a ete construit, beaucoup d'eau a coule... dans le stade. Ce pauvre stade est toujours reste a un stade... pas tres avance. Les compagnies d'assurances ont toujours hesite a assurer cette structure inachevee et fragile: c'est pourquoi le stade n'est pas couvert. Le stade a quand meme eu la couverture des medias. Grace a cela, on connait la toile de fond de l'histoire. Alors on fut force de sortir cette fameuse toile de ses toiles d'araignees et de la poser comme il se toit. Nous avons alors enfin pu inaugurer l'ouverture du stade ferme. Toutefois, cette pauvre toile allait subir un drame... dechirant. Et comme cela s'est produit a plusieurs reprises, on a du la repriser a plusieurs reprises, pour empecher qu'elle se rebrise. Le sort de cette toile toujours brisee n'est pas tres prise. Il y a peut-etre espoir d'ameliorer les choses, si l'Orchestre Symphonique de Montreal donnait un concert au stade. Imaginez: Charles Dutoit, au stade! C'est le specialiste qu'il faut. Enfin, le mal est fait et le mieux qu'on puisse faire maintenant, c'est d'esperer que cela ne se reproduise plus. On n'en est pas arrive au stade de la reproduction quand meme! Qu'un monument ne souffre plus jamais d'une erreur aussi... monumentale. Qu'un tel precedent ne cree pas de suivant. On peut quand meme se dire, pour s'encourager: jamais deux sans toit! --< Sacre sac! >-- Fait etrange, on trouva un jour un jeune garcon parlant a son sac d'ecole: ``je ne suis plus capable de te supporter''. Fait encore plus etrange, celui-ci lui repondit: ``Ce n'est pas de ma faute si ca pese... des livres.'' ``-Ce n'est pas une question de poids. Tu as encore perdu mon crayon et je ne le supporte pas. -Tu ne vas quand meme pas me mettre a dos pour ca. -Non, mais je vais te mettre a sac, jusqu'a ce que je le trouve. -Allez, calme-toi, je vais le trouver ton crayon.'' Le sac, se tournant vers son contenu, lui dit: ``Mon cher coffre a crayon, trouve le crayon ou je te coffre.'' Le coffre usa de tout son coffre et cria: ``-Bic, mon cheri ou es-tu? -Eh oh, c'est un crayon que je cherche, pas un stylo. -C'est son nom de plume...'' Rien a faire, le crayon ne laissait toujours aucun signe d'ecrit. Ce n'etait pas la premiere fois qu'il disparaissait sans laisser de traces. Dans le brouhaha des outils qui s'entrechoquaient dans le coffre a crayons, on entendait des rumeurs naitre: ``-S'il s'efface encore une fois il faudra aller voir le correcteur, qu'il le liquide. -Oui, je m'en doutais qu'il recidiverait: il avait mauvaise mine ses derniers jours. -C'est qu'il vient de casser... -Peu importe, ce n'est pas une raison pour avoir une telle ligne de conduite. -C'est un de ses traits de caractere...'' Quelques bonnes idees jaillirent: ``-Quelqu'un l'a certainement vu! -On devrait aller voir le rapporteur, il denonce toujours tout le monde. -Ou aller voir le gabarit de cercle: avec un gabarit pareil, il est capable de faire parler n'importe qui.'' Certains tenterent de prendre la situation en main, comme la regle, par exemple: ``-Ce crayon doit suivre la regle et aller dans le droit chemin, ou ca ira mal. -Ce n'est parce que tu es graduee que tu es plus intelligente que les autres.'', lui reprocha-t-on. Cependant, la regle, tres futee et tres affutee, voulait trancher la question et en particulier la feuille qui supportait la question. Pourquoi la feuille? Parce que c'etait chez elle que le crayon avait laisse ses dernieres traces. L'interrogatoire restait vain: les feuilles restaient muettes (et sourdes). Peut-etre etaient-elles dures de la feuille? ``Vous vous taisez? Quel est votre mobile, feuille?'', questionna la regle. ``(.)'', cria la feuille. ``-Je les connais, ces feuilles, elles finissent toujours par plier. Elles sont toutes les memes, toutes de la meme lignee.'' ``(.)'', acquiessa la feuille. ``C'est la guerre!'', gueula la regle. ``Amenez le porte-mine!'', cria un inconnu. ``Ca va signer. Il y en a qui vont perdre des plumes...'', poursuivit la regle. ``Amenez le porte-plume.'', cria le meme inconnu, qu'on commence a bien connaitre. Puis la regle suggera enfin une alternative raisonnable: ``nous allons quadriller les feuilles pour localiser le point ou le crayon est.'' Tandis qu'une solution se dessinait, l'efface restait rongee (comme toute efface qui se respecte) d'inquietude. Puis soudain: ``Coucou'', de s'ecrire (pardon, de s'ecrier) le crayon. Chacun participa a l'engueulade qui suivit: ``Te voila, toi! Ou etais-tu, espece d'illustre sans dessein? Crayon (in)gras, c'est a cette heure que tu te pointe? Chez toi, la ponctualite n'est pas un sens tres aiguise.'' Tout ce brouhaha incita le proprietaire du sac a prendre une resolution: ``l'ordre ne regne pas chez toi, cher sac. Je vais etre oblige de t'ouvrir un casier. Judicieux qu'il serait de t'y enfermer. Et dorenavant, tais-toi!'' Et c'est depuis ce premier jour d'ecole que ce sac a cesse de parler et fut contraint de rester enferme dans une case pour la plus grande partie de la journee, plutot que d'aller gambader gaiement dans les pres, parmi les buissons. Finie, l'ecole buissonniere! --< Idees noires et blancs de memoire >-- Avant la presentation de la representation je presente des signes inquietants d'inquietude. Le trac me tracasse, me traque et m'attaque. Il n'est pas gai le begaiement qui me gagne. La gene qui git sous mes meninges, jaillit deja. Mais je me marmonne a moi-meme que le calme domine de maniere a momifier mes montees d'enervements maniaques. Heureusement, je n'ai pas le temps de faire des alliterations sur litteralement toutes les lettres avant que le moment ou je dois monter sur scene n'arrive. Je me prepare a dire ma premiere replique. Ce n'est pas vraiment une replique puisque rien n'a ete dit auparavant. Je profere donc ma premiere plique: ``Il va sans dire que...'' A ce moment, un blanc de memoire me saisit. Mais la salle trouve que ce blanc illustre bien l'esprit de la phrase... et eclate de rire. Je dois absolument me rappeler de ce blanc de memoire pour l'ajouter a la prochaine representation. Le pire etait que je n'arrivais pas a me rappeler de mon texte. Et l'assistance ne m'etait pas d'une grande assistance. Si seulement j'avais eu un souffleur, j'aurais eu l'air... de savoir quoi dire. Sinon, je quoi ais-je l'air... devant toutes les aspirations du public. Plus le silence durait, plus l'assistance devenait dure. Je n'aurais pas cru que les gens oseraient deja exiger le remboursement de leur billet. Toutefois le public ne s'est pas privatise (pardon, ne s'est pas prive). J'ai du alors improviser. Mais on ne s'improvise pas improvisateur. Sans souffleur, l'inspiration ne vient pas vite. Tandis que la transpiration m'irrigait la figure, je sus (et je sue) me tirer d'affaire: ``Il va sans dire... que je me dedie au non-dit. Car le non-dit n'a pas dit son dernier mot. Je suis donc devenu un specialiste en jeux de mots utilisant la pantomime.'' La salle, commencant a percevoir l'importance du non-dit, se tut. J'avais regle une partie de mon probleme: je n'avais plus a parler. Je devais cependant bouger! J'entamai donc le celebre poeme pour sourds et muets qui traduit la philosophie meme de la pantomime: ``Je m'emeus quand tu te meus.'' Essayez de mimer ca! Mais la foule n'y compris rien. Elle ne s'emut point, elle s'ameuta. Devant cette meute en emeute, je dus m'enfuir. Ca m'apprendra a avoir un blanc de memoire. Dorenavant, quand ma matiere grise aura des blancs, je broirai du noir! --< Element hyper-actif >-- Il y a des gens qui ne peuvent s'empecher d'etre occupes sans arret. Ils font partie de tous les comites, participent a toutes les activites et ne restent pas une seconde en place. Bref, ils sont partout mais il est impossible de les trouver, comme Dieu. Mais contrairement a Dieu, ils sont vulnerables au burn out. Retrouvons donc l'un d'eux chez son psychologue. ``-J'ai trop vecu sous tension, en courant sans interruption. -Ce sont les sources de votre mal, vous devriez les controler. -Vous avez raison, d'autant plus que j'ai neglige mon alimentation. Maintenant, je suis hors circuit. -Vous tombez pile, ces types de problemes sont justement ma specialite. Je connais une batterie de traitement. -Pas l'electrochoc, j'espere. -N'ayez crainte pour votre self, le transformateur de votre vie n'en aura pas besoin. -Qu'allez vous faire, alors? J'ai peur de me faire embobiner dans je ne sais quel traitement. -N'ayez crainte, je ne cherche pas a vous induire... en erreur. Voyez-vous, j'ai les capacites: je me charge de tout (je chargerai ensuite le gouvernement). Vous me disiez que vous negligiez votre alimentation... -Oui, je ne mangeais que du fast-food. -Evidement, pour allez plus vite. -C'est ca: j'aimais bien le poulet presse. -Maintenant rappelez-moi vos symptomes. -Ma vie file tellement que j'en perds le fil. -Alors, laissez-moi vous dire que c'est courant, c'est anodin. -Mais je me sens vraiment mal prise et je ne m'en fiche pas. Il y a peut-etre une connexion entre mon mal et quelque chose de potentiellement plus grave. -Je comprends votre reVolt. Toutefois le risque potentiel est faible. Vous n'avez qu'a prendre du repos et vous isoler quelque temps de votre vie active. -Ce n'est pas en m'isolant que j'apprendrai comment me conduire. Des la fin de ces vacances, j'ai peur que ma vie en courant continue. -Il y a une alternative: redresser la situation. Pour ce traitement, il vous faut une bonne dose diode. Des vacances pres de la mer devraient suffire pour vous donner gout a ne rien faire. -Ecoutez, je vous l'ai dit, j'ai perdu le fil: je n'arrive pas a joindre les deux bouts. Je ne peux me payer un tel voyage. -Il ne reste que le traitement-choc. Je vous prescris d'ecouter tous les teleromans: il n'y a rien de mieux pour diminuer la productivite d'un individu. -J'ai peur de diminuer mes facultes intellectuelles. -Elle sont facultatives pour reussir, mais si ca vous inquiete vraiment, n'ecoutez qu'un episode sur deux en essayant d'imaginer ce qui s'est passe entre. L'effort mental devrait etre raisonnable... -Merci, je vais me sentir plus a ma place dans la societe. --< Cette personne... c'est quelqu'un >-- -Allo? y'a quelqu'un? -Non, y'a personne! -Ca tombe bien, c'est justement a une personne que je voulais parler. -Et a quelle personne voulez-vous parler? -A personne en particulier... -C'est pour ca que vous appelez chez un particulier? -Qu'avez vous de particulier? -Rien, je suis un particulier comme vous et moi. -Dommage, en appelant chez personne, j'esperais tomber, par hasard, sur une personalite. -Effectivement, j'etais une personne alitee et vous m'avez reveille. -Desole. Je manque d'adresse. -Je ne vous donnerez certainement pas la mienne, j'ai bien trop peur que vous veniez me parler ici, en personne! -Pourtant, de personne a personne, on se comprend mieux. -Alors, ne venez que lorsque personne n'est la. Je ne desire pas vous parler. -Donnez-moi votre adresse alors: je pourrais vous adresser une lettre plutot que de vous adresser la parole. -Si vous etes plus un homme de lettre que de parole, taisez-vous! -Que voulez-vous, quand je m'ecrit, je m'ecrie aussi. -Alors ecrivez-vous et ne m'embetez plus. -Vous voulez que je m'envoie, par la poste, mon propre texte? -Oubliez ca! Avec votre manque d'adresse, vous n'irez pas loin si vous vous envoyez par la poste. -Et vous osez me dire cela avec ce timbre de voix? -C'est normal, vous etes deja timbre... si timbre qu'on devrait vous obliterer de la surface de la terre. -Comment osez-vous? Vous qui n'etes personne et moi, quelqu'un. -Arreter de faire le pretentieux: je n'accepte pas les frais d'appel. -Si vous etiez mon employe, je vous f'rais virer. -Je ne suis pas votre employe, employez vous a d'autres chose. -Savez-vous a qui vous parlez ainsi? -Non vous ne vous etes pas presente, et meme si vous vous presentiez, je ne voterais pas pour vous. -Comment avez-vous devine que j'etais politicien? -Votre maniere de parler pour ne rien dire ne trompe pas. -Ceci etait un message enregistre. -Ceci aussi. (Bip.) --< snoixelfeR >-- Dieu existe-t-il? Dieu seul le sait. Des physiciens ont montre que le vide n'est pas vide. Merci, ca comble un vide dans mes connaissances. D'autres physiciens ont montre que l'atome (mot qui veut dire ``indivisible'') pouvait etre fissionne. Non mais, vous avez fini de changer d'avis? Pourquoi la terre tourne-t-elle? Si elle ne tournait pas, l'une face de ses faces deviendrait tres chaude et l'autre, tres froide. La vie n'aurait donc pas pu s'y developper. Aucun humain n'aurait ainsi existe et il n'y aurait eu personne sur terre pour se poser la question. Il en decoule que la terre tourne et il ne peut en etre autrement puisqu'on s'est pose la question. Le bon physicien theorique est celui qui peut trouver une explication a tout phenomene. Il reste au physicien experimental a s'assurer que ce phenomene existe vraiment. Le grand probleme de la science consiste a faire coincider les decouvertes de l'un et l'autre. Autrement, quelqu'un passe inevitablement pour un fou. Un scientifique passe la premiere partie de sa vie a trouver des gens de plus haute notoriete pour co-signer ses publications, et la deuxieme partie de sa vie a chercher des publications a co-signer. L'Univers est-il infini? L'age de l'Univers est-il infini? La masse de l'Univers est-elle infinie? Avez-vous fini? Pourquoi l'Univers n'a-t-il que trois dimensions spatiales? Parce qu'il n'y a plus de lettres apres x,y et z. En thermodynamique, on definit une machine inutile comme etant une machine qui ne produit aucun travail vers l'exterieur. L'Univers est donc inutile: il ne produit aucun travail vers l'exterieur. --< Parlons en cellulaire >-- On parle de plus en plus de l'eclatement de la cellule familiale. Pourtant, ce n'est pas nouveau: bien avant l'apparition de la reproduction sexuee, les cellules se separaient deja. L'apparition des sexes n'a fait qu'empirer les choses. C'est ainsi que les unis cellulaires n'ont pas tarde a devenir des desunis cellulaires. Depuis ce temps triste, ils n'ont pluri (cellulaire). Le tout premier micro-organisme qui eut l'idee de ce nouveau mode de reproduction hesitait a le mettre en pratique. Comme les humains pensent parfois a des choses... meiose pas en parler. Que voulez-vous, quand le sexe apparut, le et la gene existait deja depuis longtemps. C'est pour ca que ca a pris des centaines de millions d'annees avant que le premier rite de rut eu lieu! Ce n'est qu'alors que les micro-orga(ni)smes decouvrirent le vieil adage: ``ou il y a des genes, il y a du plaisir''. D'autant plus qu'a l'epoque, les risques d'attraper une maladie etaient minimes. Etre un microbe comporte de gros avantages: on ne peut pas en attraper... Mais on risquerait toujours d'attraper un virus... Il semble donc encore plus avantageux d'etre soi-meme un virus. Vive la vie de virus, la vie de reve! Le hic, c'est qu'un virus n'est pas un etre tres... vivant. Bref, les maladies, il vaut mieux vivre avec, si la seule alternative c'est de ne pas vivre du tout! Bon, nous avons parle d'une des pulsions les plus primitives des etres vivants, il en reste une autre: la violence. Mais je n'ai rien d'interessant a dire la-dessus, sinon que mon pere est plus fort que le tien. Il ne nous manque plus grand-chose pour arriver au niveau du film americain moyen: il nous reste a parler d'argent. Heureusement pour nous, les bacteries de l'intestin n'ont pas encore eu le temps d'inventer le capitalisme: elles sont restees des organismes a but non-laxatif. A moins que d'autres viennent les faire ch... Ces intrus, ce sont souvent des coliformes qui, comme leur nom l'indique, sont en forme de colis. C'est pourquoi ils y mettent le paquet, et ce n'est pas un cadeau. Seuls les etres vivants evolues ont developpe les concepts de base lies a l'argent. Pour qu'arrivent les premiers porte-feuilles, il a fallut attendre l'apparition des plantes. Celles-ci decouvrirent les avantages de l'immobilier, etant les premieres a quitter le domaine du liquide (la mer). Il faut dire que les requins de la finance aiment bien le liquide: on y trouve tant de poissons. Ce n'est qu'a l'arrivee de l'homme que naquit le concept de marcher. Avec les mains libres, il put commencer a brasser de l'argent. L'homme l'a tellement brassee, qu'elle en a encaisse, l'argent. Pour se defendre, elle a developpe un coffre fort. Alors l'homme a consenti a laisser l'argent de cote, ne plus lui toucher, pour un temps, de sorte qu'elle prenne des forces. L'homme et l'argent se sont fait confiance. Un trust mutuel(le). C'est alors que l'argent s'est mis a faire des petits. A quand la reproduction sexuee chez les dollars? --< Dix mots maudits >-- Il y a des mots qui me causent des maux... et j'ai decide, une fois pour toutes, de me defouler en leur donnant la definition qu'ils meritent. Chanteur populaire: Le role du chanteur populaire consiste, non pas a chanter car les choristes s'en chargent, mais bien a figurer sur la pochette du disque. Equation empirique: Equation contenant le plus de variables arbitraires possibles, de maniere a concorder avec le plus grand nombre de mesures experimentales possibles, tout en donnant du travail a un nombre maximum de personne pour determiner la valeur de ces constantes variables dans toutes les situations possibles. Equation fondamentale: Equation dont la seule utilite est de donner de la celebrite a celui qui l'a trouvee; de la difficulte a celui qui l'utilise pendant ses etudes; des bons souvenirs a celui qui ne l'utilise plus dans son travail; et de la celebrite a celui qui se rend compte, cent ans plus tard, qu'elle est fausse. Et/ou: Mot dissuasif tentant de decourager les gens a lire les ingredients d'un produit jusqu'au bout. Synonyme: ``il se peut que l'on aie egalement mis de cette autre chose''. Ingenierie: Application (lucrative et simple) des decouvertes (subventionnees et complexes) des scientifiques Hit: Piece musicale construite selon le schema: refrain, couplet, refrain, couplet, refrain, refrain, refrain, refrain, baisser le volume, couper. Magnetisme: Tentative d'incorporer des bases scientifiques aux medecines extremement douces proposees dans le ``Lundi''. Tres utilise aussi dans les series de science-fiction des annees soixante-dix. Mu: Lettre grecque voulant dire n'importe quoi. Comme signification, choisir de preference (mais ce n'est pas essentiel) un mot qui commence par cette syllabe. (Vous ne trouvez pas qu'on devrait utiliser les caracteres chinois pour symboliser diverses quantites physiques? Au moins on ne tomberait pas toujours sur les memes symboles!) RND (Random Number Dgenerator): La touche la plus pratique d'une calculatrice scientifique lorsqu'il s'agit de remplir le tableau de resultats d'une experience de physique ratee. Lors des examens a choix multiples, elle remplace silencieusement le de ou le ``pile ou face''. Wu: Mot inutile figurant dans le dictionnaire uniquement grace aux pressions de l'Ordre des Joueurs de Scrabble. --< Histoire decousue >-- Helaine Tricot avait tout pour devenir couturiere. Autant son propre nom, que celui de la famille dont elle etait tissue, la predestinait. Sa mere lui racontait sans cesse des histoires typiques tirees de la couture de son pays, telles ``Le petit ourlet'' ou encore ``Le petit capuchon rouge'' avec son celebre ``tire la bobinette et le fil suivra''. Il etait presque decide qu'elle consacrerait son metier a tisser. C'est ainsi qu'a vingt-cinq ans Helaine demarra sa propre petite compagnie de costumes fabriques selon les cou(s)tumes de son pays natal (le Suede). Mais son succes fut de courte duree car l'automatisation commencait alors son oeuvre nefaste sur la main-d'oeuvre. ``Avec l'arrivee de ces metiers a tisser je vais perdre le mien'', se dit-elle. Elle parla donc a ses employes: ``il faut qu'on se serre les coudres''. Dans un premier temps, la reponse fut favorable: ``on peut t'aider (a coudre)''. Mais avec le temps, les employes perdirent le gout de sacrifier une partie de leur paie pour avoir la paix d'esprit. Si bien que ses employes se sont mis a la repriser et elle se sentit piquee dans son orgueil. Elle durcit le ton: ``rappelez-vous d'une des regles d'or de la couture: je suis le patron, vous devez suivre mes coupures.'' C'est alors qu'arriva un representant d'une corporation americaine, la ``Fabric of Fabric inc.'', qui proposa d'acheter sa compagnie. ``-Vous n'arrivez pas... a point, lui poursuivit-elle, ce n'est pas une solution qui maille. -Vous oubliez que nos machines filent et que vous aurez du fil a retordre a nous suivre a moins de vous joindre a nous.'' Mais la suspicion s'installait en elle. Elle se disait: ``cette histoire est cousue de fil blanc, j'aimerais savoir ce qui s'y tricote, quitte a devoir faire une filature''. Elle refusa donc l'offre. ``Ils se paieraient ma tete... et de mon porte-feuille'', pensa-t-elle. ``Ils me font marcher: les mises a pied seraient massives.'' On s'attendait a ce que la compagnie vive une situation economique precaire, certes, mais on ne se doutait pas que ce serait la fermeture-eclair. La concurrence fut si forte que ce fut la faillite. La compagnie s'etait fait battre a plates coutures. Cela fit les manchettes des quotidiens locaux. Les plaintes des employes y fusaient et y diffusaient: ``Ca valait la peine de suivre des cours, si on est meme plus capable de marcher du travail.'' Elle restait muette devant les ruines, en disant: ``Tandis que tout le monde fait le fil aux bureaux d'assurance-chomage, ici, plus un chas.'' C'est ainsi que, de fil en aiguille, elle est partie d'une industrie qui marchait au coton pour en revenir a la philosophie du bas de laine. --< Errata >-- Errata: Je viens de me rendre compte que dans un de mes textes d'il y a deux ans, j'avais oublie de fermer une parenthese: je la ferme donc ici ). Erratum: Puisqu'il n'y qu'une seule erreur, j'aurais du ecrire ``erratum'' plutot que ``errata''. Je ne pouvais pas l'indiquer dans l'erratum precedent car il y aurait eu deux erreurs et le mot ``errata'' aurait ete correct. Erratum: J'ai recompte: en fait je n'avais pas oublie de parentheses. Aucun des errata precedents ne devrait figurer... ni celui-ci. --< Experience experimentale >-- La recherche en ingenierie est coincee entre deux tendances: la volonte d'appliquer quelque chose (de forcement connu) et la volonte de trouver quelque chose (de forcement inconnu). Le resultat, est un emploi qui suit le mode d'emploi suivant... Effectuer une serie de mesures de deux grandeurs physiques. Tracer le graphique de l'une en fonction de l'autre. Si le graphique n'est pas une droite, effectuer le logarithme de l'une ou l'autre des grandeurs physiques (ou meme des deux). Retracer le graphique. Si, apres avoir repete l'operation precedente trois fois de suite, une ligne droite n'a toujours pas ete obtenue, faites passer un polynome d'ordre n-1 (n etant le nombre de point) a travers les points. Si n est superieur a 10, le logiciel charge de trouver le polynome en question plantera probablement. Dans ce cas, repertoriez vos mesures dans une table et ne vous posez plus de question. La partie experimentale est terminee, il reste a communiquer votre resultat a d'autres. Puisque ce que vous avez fait est tres simple, il s'agit maintenant de rendre cela complique pour justifier votre salaire et/ou vos subventions. Faire une recherche bibliographique poussee, de maniere a citer des auteurs au nom impressionnant (allemand ou russe, par exemple) savamment assaisonnes d'americains issus d'universites connues. Lors de la redaction d'un article, utiliser les tactiques suivantes: Ne pas expliquer directement ce que vous faites (``...using various finite element algorithms, we found...''). Laisser toujours sous entendre que vous en avez fait beaucoup plus (``...it can also be shown that...''). Montrer que vous dominez la situation (``...one can obviously conclude that...''). Lors des presentations orales, adopter l'une ou l'autre des strategies suivantes: Preparer de magnifiques acetates (ou idealement, des diapositives sur fond bleu degrade). Vous serez a priori apprecie, tout en risquant d'avoir l'air d'un simple representant de marketing. Ne rien preparer. Vous aurez alors l'air d'un habitue qui possede bien sa matiere. Vous aurez cependant l'air de quelqu'un qui la possede trop, au point de ne pas pouvoir la partager. Ces activites de recherche et de communication ne representent qu'une petite partie de votre activite: beaucoup de votre temps sera consacre a justifier votre travail. Dans une universite cela se fait en remplissant les innombrables formulaires de demande de subvention. Dans une industrie, il s'agit de convaincre son patron qui, helas, ne comprendra jamais rien a ce que vous faites. Selon lui, de toute facon, les depenses de recherche et developpement seront toujours trop elevees. Enfin, j'espere ne pas trop vous avoir decourage. C'est quand meme interessant la recherche, si on cherche un peu. Ne faites pas partie de ceux qui disent, comme Proust: ``Ah! la recherche, du temps perdu''. --< Marintime >-- Je suis un marin et je me marre bien sur terre, parce que la mer, y'en amarre. Fini de draguer les hauts fonds, maintenant je peux draguer les hauts talons... Je cherche ardemment ma sirene: mais les klaxons frequentes. Vous voyez, je suis un peu trop superficiel: c'est normal, un marin n'aime pas etre profond. Le fait d'etre souvent un saoul marin n'aide pas non plus. J'aime bien aborder les filles, quitte a ce qu'elle aient mauvaise opinion de moi, au premier sabord. Voyez-vous, je me fais souvent traiter de port. Je prefererais bien me faire accoster, toutefois j'ai bien peur que ca ne ma rive jamais. Pourtant, je ne devrais pas avoir de difficulte: je n'ai qu'a faire presque la meme chose qu'en mer. Avant, je tenais la barre, maintenant je me tiens dans les bars. Je m'occupais de la coque, je fais maintenant le coq. J'etais sur le pont, je fais maintenant le paon. Helas, chaloupe a tout coup. Pourquoi plancton un type comme moi? On a peur que j'aie des micro-organismes? Elles ont fait de moi une loque humaine... non, pire: une badluck humaine. ``La vie n'est pagaie: ferme ta gueule, pis rame'', disait d'ailleurs mon capitaine, du haut de son siege capitaine. Et puis un jour, j'eus le vent dans les voiles. Je vis une rose desvents moi. Je m'orientai vers elle, me ventant en peu. ``O seant de reve, devant toi je dis vague'', lui dis-je. Elle fut touchee par ma poesie, n'ayant pas eu le temps de regarder la signification du mot ``seant'' dans le dictionnaire. Je (la) poursuivit donc: ``-Voulez-vous m'accorder cette vague? -Je n'aime pas valser, malheureusement. -Eh bien alors, tanguons. -Vous y allez un peu vite! -Un cruiser va toujours vite, qu'il y ait de la vague ou non.'' Je m'interessai ensuite a sa vie privee, me permettant de la tutoyer: ``-Es-tu maree? -Non, je n'ai pas encore eu ma lune (de miel). -Tu rigoles! -Non, je ne suis pas marree.'' Mais elle me trouvait un peu impatient: ``-Moderez vos transports: vous n'allez pas en bateau, mais par avion! -C'est que j'aime bien m'envoyer en l'... -Assez! Ou je pars en courant, marin.'' Me voyant trop venir, elle partit. Je lui ai ecrit une lettre d'amour ou je lui decris toute ma peine: j'y ai meme mouille l'encre pour qu'elle ne parte pas au large. Elle me repondit en cinq mots: ``je reste chez ma mere''. Dans ce cas, moi aussi, je retourne chez ma mer... --< Erreur sur la personne >-- Pour parler a la premiere personne venue, la deuxieme personne est ideale, tout le monde s'entend la-dessus. Mais il est souvent difficile de deviner quand il faut vouvoyer ou tutoyer quelqu'un. Cela engendre des quiproquos particuliers... ``-Bonjour, comment allez-vous? -Que je ne vous voie plus me vouvoyer. -Vous voyez, c'est difficile de m'y vouer. -Je vous demande de vous y tuer. -Justement, je me tue a essayer de le faire. -Si tu t'y tues tant, pourquoi de temps en temps tentes-tu de me dire vous? -Rien a faire, quand je vous vois, vous, je vous vouvoie.'' -Essayons autre chose... Me tutoieras-tu, toi, si moi je te tutoie? -Me tueras-tu, toi, si je ne te tutoie? -Oui, tetu, si tetu tu es. -Vous dites? -J'eus prefere que tu te tus, plutot que tu me voues, ce ``vous''. -Si je m'etais tu, dis-tu, tu n'eus point vu de ``vous''. -Oui, je n'en eus point ouis.'' Si la plupart des gens se contentent de la deuxieme personne, les situations d'extreme politesse requierent l'utilisation de la troisieme personne meme s'il n'y a que deux personnes qui se parlent. Par exemple, un serveur demande a un client: ``Monsieur desirerait-il le menu?'' Alors le client regarde derriere lui pour etre sur que le serveur s'adresse a lui, puis repond: ``Ma personne, puisque je ne vois personne d'autre, desirerait le menu, surtout s'il est fourni et non menu''. Le client, encore tout surpris de l'intervention de la troisieme personne dans ses propres paroles, n'en est pas encore au bout de ses surprises. A la table voisine se trouve un roi qui tient vraiment a ce qu'on le respecte. Le serveur, reconnaissant l'insuffisance de la troisieme personne (``Le roi, desirerait-il...''), trouve une formule plus soignee. Il interpelle le roi en vouvoyant sa troisieme personne: ``Votre majeste desirerait-elle le menu?'' Devant le froncement des sourcils du roi, le serveur s'empresse de corriger en s'adressant, a la troisieme personne, a la troisieme personne: ``Sa majeste desirerait-elle le menu?'' Plus tard, de retour au client ordinaire, le serveur a du mal a se readapter: ``-Voila le menu de son monsieur. -Et le mien? -Pardon, voila le menu de votre monsieur. -Merci, je lui donnerai.'' Une fois dans la cuisine, le serveur tutoie le cuisinier et vouvoie son patron. De retour parmi les clients, il les iloie tandis qu'il se jeoie dans ses pensees. De plus en plus inquiet, il voit arriver un nouveau client, d'allure fort respectable. A quelle personne aura-t-il affaire? Il constate, rassure, qu'il est anglophone et qu'il pourra lui adresser des ``you'' sans aucun risque. Erreur, car c'etait un Dieu. Et la tradition anglo-saxonne veut que l'on s'adresse a Dieu avec le pronom ``thee'' qui n'est rien d'autre que le ``tu'' de l'anglais, avant qu'il ne devienne archaique et qu'il soit remplace par ``you''! --< Le tronc pas si commun que ca. >-- A quoi sert le tronc commun? (Note: Le tronc commun est la premiere annee d'etude a l'Ecole Polytechnique.) A prendre racine dans l'etablissement, pour pouvoir ensuite y etre pousse a bout. Ce tronc, c'est l'arbre moteur de l'ecole. Bien sur, l'on s'y fait souvent planter. Meme si l'on y buche comme des fous, ca nous repousse a bout! C'est qu'il y a continuellement des bouts durs (boutures?). Plus on buche, plus ca se corse, mais il ne faut pas se laisser abattre: on risquerait de se retrouver dans le champ. Que voulez-vous, la tete, il faut savoir labourer. Et a force de labourer, on recolte de la culture generale. Puisque certains en ont marre tandis que pour d'autres elle leur est chere, on pourrait l'appeler ``culture maraichere''. Il faut malheureusement y potacher sans arret (a ne pas confondre avec ``potager'', ce qui sous entendrait que l'on y vegete). Il semble, helas, qu'il faille oublier un peu la culture physique car on ne peut a la fois etre un champi(gn)on intellectuel et faire des spores. A moins de gerer son temps comme un fou... (car quand des fou-geres il y a bien sur des spores). Au tronc commun, on debroussaille toute l'ingenierie, pour trouver sa branche, sans deviner la jungle qui nous y attend... Et plus loin sur la branche, se trouve une feuille: notre papier. Et encore bien plus loin sur la branche, se trouve eventuellement une enorme quantite de feuille: notre memoire de doctorat. Pendant qu'il debroussaille ce sous-bois, l'etudiant typique boit et devient saoul. Plus le temps avance, plus il boit des verres et plus il les boit secs. C'est qu'il vieillit: il y entre sous forme d'un bois vert et en sort sous forme d'un bois sec, d'ou l'expression: ``Salut vieille branche... tu te rappelles du bon vieux temps?'' Toutefois, le tronc commun vise avant tout a apprendre une bonne methode de travail: tout commencer a la derniere minute de maniere a etre plus productif! Hetre capable de faire du boulot a la chene sans se dire ``j'en tremble''. (J'espere qu'apres cette phrase, vous me-risiez!) Apres avoir traverse notre tronc commun et termine notre branche sans casser, il nous faudra porter le jonc (Note: Le jonc d'ingenieur, bien sur!) sans plier. --< ``The Day After'' >-- La session etant deja bien entamee, et les etudiants aussi, par le principe d'action-reaction, il est fort possible que vous ayez deja (sur)vecu la scene suivante: la remise d'un examen mal reussi. Voici ce que cela donnerait si la poesie etait de mise dans la vie de tous les jours. Ah! que le cours est coule, Mes eleves n'ont plus le gout de vivre Se disait, tout bas, un professeur inquiete Pour ensuite, a ses etudiants, poursuivre: ``-L'examen, comment l'avez-vous trouve? -Sur notre table on nous l'a depose!'' Repondit avec humour un etudiant Qui avait oublie son sort, un moment. ``-Serieusement, comment avez-vous trouve l'intra (Note: Abreviation de l'expression: ``examen intra-trimestriel''.) -Serieusement, nous l'avons trouve extra! Si l'examen eu ete plus court, Il eut change la face du monde a ce cours. -Cet examen, pour vous, fut determinant Et comme il a ete nul, C'est non-invertible maintenant: Vous manquez de bases... en calcul. -Si nous ignorons le calcul differentiel et integral C'est qu'il nous laisse integralement indifferent. Nous divoguons tel bateau artisanal Derivant tout en se desintegrant. -Effectivement, elle semble ailleurs, votre cervelle, Vous ne vous mordez pas les doigts, bon sang? -Tant que nous n'aurons point recu notre partiel (Note: Abreviation de l'expression: ``examen partiel''.), Nous ne serons point sur les dents!'' Puis le professeur se fit une raison Un ingenieur, comme le veut la coutume N'a pas besoin de connaitre tout a fond: La surface lui suffit, le reste est dans les volumes. De cette fable, on tire un proverbe Sur lequel tous s'entendront: ``Pas besoin d'un genie en herbe Pour finir un genie en jonc.'' Oui, je sais que mes vers n'ont pas tous le meme nombre de pieds, Je ne sais point, comme Cyrano, me tirer les vers du nez. Aussi, voila pourquoi je ne fais point d'alexandrins, Me contentant que simples axelandrins. --< Pro-moteur auto-mobilier >-- Deux fanatiques de l'automobile se rencontrent. Ce sont des connaisseurs, des vrais, qui ont tout appris par eux-memes: des auto-didactes. ``-Salut, ca gaze''? -Ouais, ca roule! Mais ma voiture, elle ne roule plus trop... -Je pensais qu'avec elle, tout baignait dans l'huile? -Oui, c'est justement le probleme: ca coule de partout. Ca coule tellement que j'ai peur que mes bielles coulent aussi. Vois-tu, elle bouffe de l'huile, meme a plein regime! -O.K. arrete de parler de tes fuites. Je pense que tu as besoin d'evasion. -Prisons l'evasion! On va prendre un pot? -Un pot d'echappement? D'accord, t(r)inquons!'' Bientot, nos deux amis se retrouverent sur une terrasse sans eclat, par brise legere. ``-Une huit cylindre, S.V.P. (c'est une biere). -Avec un V8 pour moi. Depuis ma brosse de l'autre jour, je ne prends plus de chance: je prends du jus de tomate en meme temps.'' Puis, le desordre du jour revint a l'ordre du jour: ``-La semaine passee, ma came m'a lache. -Comment les segments ont pris ca? -Ca a chauffe un peu. J'ai eu du mal a trouver une came pour la remplacer. Les cames ne poussent pas dans les arbres! -Et les arbres a cames, alors? -Un peu de serieux... j'ai appele mon distributeur: ca a fait des etincelles. J'ai regle la question en deux temps, quatre mouvements. -A part ca, ca va? -Non, ma voiture commence a faire a sa tete: ma suspension fait son independante. Au 4 aout, ca a commence et au 7 aout, c'est tout: j'ai change toute la suspension. -Je vois qu'on s'amuse: 11 aout! Depuis le temps que ta voiture roule sa bosse (son boss?), elle merite une suspension. -Tres drole! Tu t'imagines le prix de tout ca. Combien de temps cela va-t-il prendre pour amortir le cout de la suspension? -Une suspension est faite pour amortir les coups a ce que je sache. Enfin... elle a vraiment des problemes de conduite ta voiture. -Oui. Apres tout, c'est normal: l'odometre arrive a son maximum. -C'est pour ca qu'elle sent si mauvais, ta voiture. -Tu as raison, je ne suis d'ailleurs plus capable de la sentir. -Elle est si vieille: elle en a souffle, des bougies. -C'est bien beau une voiture de seconde main, mais je n'ai plus assez de mes deux mains pour la reparer. -Achetes-en une nouvelle. -Mouais... les nouvelles, on ne sait jamais comment ca finit, un vrai roman. Et puis, je n'ai jamais investi dans une telle immobilisation a long terme. -Pourtant, tu dois t'y connaitre en immobilisation a long terme, depuis le temps que ton automobile est immobile! -Arrete de rire: cette voiture, c'est l'essence de ma vie. -Je sais que tu la trouves super, mais il faut te rendre a l'evidence, tu ne peux plus continuer avec elle. Elle te fait plus marcher, qu'elle ne te roule. -Tu as raison. Pourtant, je ne l'oublierai jamais: c'est le moteur de ma vie.'' --< Demi-vie de decadence >-- Je vis le jour en pleine nuit. Ca commence bien! Lorsqu'on a voulu me donner un nom, on m'a denomme. Alors je n'ai plus de nom. A deux ans je marchais encore avec une marchette. On m'a fait croire que je savais marcher, mais on m'avait fait marcher. A trois ans, je n'avais pas encore dit mon premier mot. Mais je n'avais pas encore dit mon dernier mot non plus. Toujours a trois ans, je ne savais pas encore manger tout seul... sauf des volees. Quand j'ai finalement appris a parler et a manger, on m'a dit: ``ne parle pas la bouche pleine!'' On m'a aussi dit de finir mon assiette. Je l'ai lancee par terre: elle etait finie. J'ai souvent cru avoir atteint l'age de raison, mais j'avais tort. A l'ecole, j'etais toujours colle. Et encore, je me retenais, parce que j'aurais eu des retenues, en plus. J'ai du suivre des cours de francais, langue seconde. J'ai fait mon secondaire professionnel a la maniere d'un amateur. J'etudiais a moitie, et je doublais. C'etait un secondaire court mais il a ete long quand meme. Bref, a l'ecole, je n'ai rien appris. Ca m'apprendra! Arrive sur le marche du travail, j'ai couru du travail. Comme je suis paresseux, j'ai plutot marche du travail. Je me suis employe a me trouver un emploi. J'etais tellement mauvais que je me suis congedie. Je me sentais si desarme devant la vie, que je suis entre dans l'armee. Moi qui voulais qu'on m'ecoute, on m'a dit de me mili-taire. J'ai trouve la mi-lisse plutot mi-rude. Je n'ai jamais eu un faible pour les Forces. Quand il a ete question d'aller se battre, je me suis debattu. J'ai ete tue sur le front... et sur le reste du corps, forcement. Quelle vie! Vous allez me dire que ce n'est pas grave, ``les derniers seront les premiers''. Mais comme j'etais le premier a etre veritablement le dernier, Dieu ne savait pas ou me placer. Il m'a alors demande ce que j'avais fait pour mon prochain. Je lui ai repondu que je n'en avais pas, puisque j'etais le dernier. Dieu m'a alors annonce que j'avais cree un precedant. Et sur ce, il cria: ``au suivant!'' tout en m'envoyant au purgatoire pour lui laisser le temps de penser a ma situation. Je criai alors a Dieu: ``-Vous faites erreur! -Et alors, n'arrive-t-il pas qu'un humain fasse une erreur? -Mais vous etes Dieu! -Ne vous ai-je pas cree a mon image? -Je vous croyais plus sage... -Je suis aussi sage que mon image...'' ``Ca promet!'', me suis-je dit. Pour me rassurer, Dieu m'annonca que je ne resterais que la moitie de l'eternite au purgatoire. J'acceptai le compromis. Ce n'est que bien plus tard que je me rendis compte qu'une moitie d'eternite, c'est encore une eternite! Je savais deja que je m'etais fait avoir sur toute la ligne (de vie) mais je venais de me rendre compte que je m'etais fait avoir sur toute la demi-droite de la demi-eternite! --< La guerre de ces sessions >-- Tous les etudiants se battent contre cette session en esperant sa cessation. Vont-ils se rendre a la fin sans se rendre avant la fin? Plus les travaux arrivent a echeance, plus les etudiants arrivent a la decheance. Ils ont leurs examens sur la conscience (et c'est l'examen de conscience: ai-j'etudie?). Les locaux d'informatique et les laboratoires papillonnent d'activite (d'activites sociales surtout). Les salles de cours, elles, chenillent d'inactivite. En effet, y etre present est une chose du passe. Les professeurs usent de leurs dernieres energies pour creer de la matiere. Les etudiants, qui deviennent radicalement anti-matiere, n'en sont que plus annihiles. C'est que l'esprit de tous est ailleurs: dehors, par exemple. La temperature se rechauffe et le temperament aussi. Le jour s'allonge et les nuits se raccourcissent, bien que ca ne soit pas forcement relie... On pense de plus en plus a se faire dorer, bronzer (et argenter?). On a hate au grillage saisonnier sur les chaises longues et au grillage assaisonne sur le barbecue. Le degel nous rappelle que les vacances approchent, apres nous avoir revele, en une fois, toutes les odeurs qu'avait paisiblement emmagasinees la neige au cours de l'hiver. Le degel decouvre aussi, ironiquement, des graffiti sur le sol: ``non au degel''. Les detritus, sedimentes par les precipitations de flocons, se manifestent precipitamment et jonchent le sol de leur presence, plutot que de le laisser paisiblement joncher tout seul comme un grand. Les plus grands payeurs de taxes peuvent maintenant admirer l'ampleur du magot qu'ils ont perdu en megots, pendant tout cet hiver. Les derniers restes de rhume en prennent pour leur rhume tandis que la grippe ne s'agrippe plus. Il ne reste que quelques sinusites inusitees et quelques bronchites qui n'ont pas encore bronche. N'allez cependant pas croire qu'avec l'ete, les gastro-enterites seront enterrees. C'est tout cela qui detourne l'attention, si on n'y fait pas attention. Comment garder notre concentration dans nos cours de concentration? En hiver, cela avait bien ete. Mais en ete, on a ces problemes divers. Il fallait en plus que le moment ou l'on a le plus de travail tombe a l'arrivee des beaux jours. A force de tout remettre a plus tard, vient le jour ou ``plus tard'', c'est aujourd'hui. Le futur sera toujours un dur moment a passer. (Le passe aussi, mais il est deja passe.) Heureusement que les terrasses ne sont pas encore ouvertes, sinon ca nous aurait terrasse... --< Couple peu coordonne >-- Un jour, un mathematicien rencontra une belle inconnue. Elle et lui semblaient avoir tant de choses en commun: il tenta donc de se mettre en evidence. Il lui demanda immediatement ses coordonnees, histoire de pouvoir la rejoindre ailleurs qu'en ce point de rencontre. Ils discuterent ensuite de leurs origines et des choses sur lesquelles leurs interets etaient axes. Il chercha bientot a etre seul avec elle: a isoler sa belle inconnue, en somme. Des qu'ils furent seuls, ensemble, les accolades ne tarderent pas. Leur union ne commenca vraiment qu'a ce moment et non lors de leur premiere intersection. C'est qu'elle repetait sans cesse: ``mon z'heros''. Il n'y avait qu'une seule solution... puisqu'il lemme, lui aussi. Leurs courbes se toucherent. ``Monhomme...'', souffla-t-elle. ``Helene (ln, en abrege)...'', repondit-t-il. A partir de ce point, ils formerent un couple: non pas x et y, mathematiquement parlant, mais XX et XY, genetiquement parlant. Ils se crurent dorenavant indivisible: c'etait un amour premier. Apres tout, c'est bien connu, l'amour est irrationnel, ce qui ne simplifie pas les choses. Comme dans tout bon conte, ils vecurent si heureux qu'ils en eurent bientot des enfants. Beaucoup d'enfants. Et cela leur coutait de plus en plus cher: a se multiplier ainsi, l'addition augmentait et ils ne pouvaient s'y soustraire. Ils etaient divises sur le sujet, mais apres avoir passe les quatre operations, il songerent a l'Operation. Cependant, qui allait la subir cette Operation, elle ou lui? Selon lui, l'Operation n'etait pas commutative et c'etait celle qui possedait la matrice qui devait la subir. Elle lui repondit qu'elle etait decue car en tant que mathematicien, il aurait du etre pour l'egalite. Ils se rendirent alors compte que, dans bien des domaines, ils ne partageaient vraiment pas les memes valeurs propres, et la situation se degenerait: ils voulaient maintenant devenir (lineairement) independants. Cela les toucha droit au ker et entraina bien des pepins, voir meme des noyaux. Il n'y avait plus de solution car ils formaient maintenant un systeme inconsistant. Ils se separerent donc, augmentant ainsi leur degre de liberte... pour peut-etre rencontrer d'autres courbes. Toutefois leurs enfants auront a s'habituer a changer constamment de systeme de coordonnees, passant d'un couple a l'autre a tout moment, ce qui les desaxera certainement. C'etait un amour premier: personne ne pouvait les diviser... sauf eux-memes. L'amour est irrationnel: il ne fait pas de quartier... meme avec notre moitie. Il aurait du, des le debut, faire un ``x'' sur cette inconnue. --< Discours sur les methodes >-- Les etudiants ont developpe tout un arsenal de methodes les aidant a repondre aux questions d'examen. En voici quelques unes... Methode Monte-Carlo (i.e. statistique): Le hasard fait parfois bien les choses... surtout dans un examen a choix de reponses. Methode des perturbations: Pour les questions du genre ``demontrez que...'' il arrive souvent que l'on n'obtienne pas exactement le resultat desire. La methode de perturbations consiste a changer quelques signes ici et la, imperceptiblement, de maniere a obtenir la bonne reponse. Methode esthetique: Une reponse tres compliquee (i.e. moins belle) a plus de chance d'etre fausse qu'une simple et belle reponse. Il s'agit donc de reessayer de resoudre le probleme jusqu'a ce que la solution soit belle. Methode scientifique (formulation d'hypotheses): Dans une suite de questions qui dependent chacune de la reponse precedente, il est parfois frustrant de ne pas savoir repondre a la premiere question. Il est alors tentant d'essayer des reponses du style: ``si j'avais repondu a la question 1, j'aurais pris ce resultat, multiplie par la reponse 2, si je l'avais trouvee...'' Methode des developpements en serie: Quand ils ne savent pas quoi dire, certains etudiants ont tendance a ecrire de longues explications. Ils font donc des developpements... en serie. Methode de l'abstinence: Opposee de la precedente. Ayant trop peur de dire des betises, certains etudiants evitent de repondre quoi que ce soit a certaines questions. Cela epargne du travail au professeur qui est alors plus enclin a leur donner des points lorsqu'ils ecrivent quelque chose. Methode phenomenologique: Cette methode consiste a multiplier, diviser ou exposer toutes les valeurs de la donnee du probleme de maniere a obtenir un nombre qui a les memes unites que la reponse desiree. Methode du calcul des residus: Quand quelqu'un connait tres peu la matiere, il lui est peut-etre preferable de scruter a fond l'examen pour voir s'il n'y aurait pas un petit numero facile qui lui donnerait quelques points. Methode numerique: Completer le plus de numeros possibles, mais sans reflechir. Methode de la moindre action: Il s'agit d'utiliser abusivement des expressions comme: ``par inspection, on trouve'', ``par symetrie, il vient'' ou ``on peut facilement montrer que'' et les faire suivre d'une equation gigantesque. Bien que peu utilisee par les etudiants, cette methode figure couramment dans tout bon solutionnaire d'examen qui se respecte. --< Un amour physique >-- Y a-t-il place, en sciences, a la folie et a la romance? Oui, car apres tout, des liaisons covalentes aux liaisons covalentines, il n'y a peut-etre pas plus de differences qu'entre un party et une partycule en agitation thermique... Un jour (ou plutot a une microseconde en particulier), un electron celibataire qui orbitait encore tout pres du noyau familial, s'ennuyait. Tandis qu'il etait avachi (cela lui causera plus tard un probleme spinal), pres de sa moment (magnetique), il decida d'acquerir son energie de liberation. Mais la permittivite magnetique de sa moment etait exactement non nulle, et elle s'ecria: ``Que je ne te vois pas courant avec je ne sais quelle bande de con... duction''. La reaction de sa moment lui fit faire un saut en s'ecriant: ``Gap!''. Pourtant, fermement decide a en finir avec sa configuration actuelle, il conclut: ``lepton tout ca de cote, et muons.'' Toutefois, prive de son principal centre d'attraction, il s'ennuyait toujours autant. Il tenta alors de decouvrir comment les autres trouvaient le bonheur. Il remarqua que certains se contentaient d'etre dans l'entourage de metaux lourds (heavy metal, pour les puristes). D'autres, moins reactifs, trouvaient la joie a l'ecoute de quantiques et de mecanique classique. Il en vit meme qui s'affairaient a planifier leur emploi du temps sur un tableau periodique. Cependant, une activite l'interessa surtout: les liaisons entre particules possedant certaines affinites magnetiques (aussi appelees a(i)mants). Comment allait-il faire comme eux? Il venait a peine de quitter le noyau familial et ne s'etait encore contente que d'actes timides (actinides?) envers les autres: quelques photons roses qui n'atteignaient meme pas les electrons de coeur. Mais l'espoir etait permis: il avait sa demi-vie devant lui. Tout a coup, tout pres d'un gros beta, il apercu une electron(e) de spin oppose. Elle (l'electron(e) en question) se mirait dans l'onde (plus precisement, dans sa fonction d'onde). Il tenta de la seduire en lui chantant la pomme (de Newton). Helas, il ne faisait visiblement pas le poids dans le domaine du chant gravitationnel, surtout a cote du gros beta. Il reprit de plus belles avec un chant electrique, mais l'electron(e) eu une vision tres negative de la chose. Les photons roses, eux, ne l'exciterent meme pas. Heureusement, a ce moment, le beta aux manieres peu cathodiques remarqua des cibles plus interessantes dans une mince feuille d'or situe non loin de la. Notre electron avait maintenant la voie libre et etudia sa positron (pardon, sa position): qu'avait-il qui pourrait la seduire? Il se rappela qu'il venait d'avoir son permis de conduire... et profita d'un moment de sang froid pour devenir supra-conducteur! L'effet fut immediat: elle fut seduite et nos deux electrons se couplerent en paire (amperes?). Et, miraculeusement, leurs vies devint sublime et vaporeuse. (Mais avant de se vaporiser, ils fondirent l'un sur l'autre.) Ils vecurent donc heureux et eurent une famille nombreuse d'elements. --< Impayable Vendeur >-- La loi de l'offre et de la demande comporte comme corollaire que tout client doit necessairement se faire offrir plein de choses qu'il ne demande pas. C'est ainsi que lorsqu'un client entre dans un magasin et s'y fait instantanement apostropher par un vendeur. C'est ce qui arriva ce jour la. ``-Bonjour, puis-je vous aider a depenser? -J'y pensais justement. -Eh bien, laissez-moi penser a votre place et de-pensez a votre aise.'' Le vendeur fit alors etalage de ses qualites de vendeur a l'etalage. ``-Voici le meilleur modele que vous puissiez trouver. -Vous etes si bon vendeur que vous semblez meme etre vendu a cette marque. -C'est pour ca qu'on m'a engage. -Vraiment? -J'ai ete tres convaincant lors de l'entrevue: voyez-vous, je sais me vendre. -Et on vous a achete pour etre vendu a une marque, c'est ca? -Oui, il n'y a pas de honte a ca. Et depuis, je me vante de mes ventes. -Allez, restez modeste devant le Roi (qu'est le client). -Oui, monsieur, je m'emploie a vous servir. -Vous, vous employez? Vous etes donc votre propre patron. Il n'y a rien de surprenant au fait que vous ayez ete engage! -C'etait une maniere de parler: je m'engage a m'exprimez clairement dorenavant. -Vous vous engagez a parler maintenant: decidement, vous aimez vous payer de vous meme.'' Le vendeur devenait visiblement contrarie et de moins en moins sur de lui: c'est ce que l'acheteur recherchait. Il eviterait ainsi que son etre se fasse avoir en ne perdant qu'une petite partie de son avoir et de son bien-etre. Le client, en guise de juste retour des choses, apostropha alors le vendeur: ``-Bon, serieusement, nous en etions a considerer ce modele... -Oui, il est absolument unique. -Pourtant, il me semble que j'aie vu d'autres modeles fort semblables. -Mais ce qui le rend unique, c'est son prix. -Curieux, il me semble justement eleve. -Un modele avec un prix aussi eleve c'est extremement rare. Et puisque tout ce qui est rare est cher, ce modele ne peut faire autrement que de couter cher. -Vous me faites marcher. -Que voulez-vous, il faut faire marcher l'economie. Et puisque nous faisons tous partie de l'economie, il faut bien vous faire marcher un peu aussi. -A ce prix la, j'espere que ca fait marcher l'economie d'ici. Est-ce un modele importe? -Non, C'est fabrique ici, c'est tout ce qui importe. -Ca s'importe ou c'est fabrique ici, decidez-vous! -Tres drole... c'est a vous de decider. -Je trouve, mon cher, que c'est trop cher.'' Le vendeur tenta de tenter l'acheteur par l'illegalite: ``-Je vous proposerais bien un paiement en dessous de la table. Dommage que nous soyons limites... -Je croyais que vous etiez enregistres... mais si c'etait le cas, vous n'oseriez pas dire de telles choses. -Commandite vous? -Si vous etiez en societe, vous n'auriez pas dit de telles choses. -En societe? Vous voulez dire en compagnie d'autres gens. -Oui. Payer en dessous de la table est une drole de maniere de faire marcher l'economie.'' Devant le mutisme du vendeur et surtout devant le prix rutilant du produit en vente, le client quitta le lieu d'ou il etait roi, en declarant: ``Je dois vous dire qu'en tant que vendeur vendu, vous ne faites rien pour vous racheter.'' --< Rendez-vous chez l'optometriste, ou... Blind date >-- Je ne pus m'empecher d'examiner attentivement l'optometriste qui m'examina. Je l'avoue, j'avais un oeil sur elle, et elle, les yeux sur les miens. ``Ca regarde mal!, m'annonca-t-elle, vous louchez.'' Mais elle ne se doutait pas encore que c'etait elle qui me faisait loucher. ``Regardez-moi droit dans les yeux'', poursuivit-elle tandis que moi, je ne demandais pas mieux. Je la regardai pendant si longtemps que j'en fini par m'en rincer l'oeil. Voyant mes yeux devenir humides, elle me demanda: ``vous avez quelque chose dans l'oeil?'' Elle n'aurait pas du dire ``quelque chose'' mais plutot ``quelqu'un''. Je commencai bientot a m'interesser a sa vie privee. Toutefois, mes questions se firent trop directes, et sa reaction fut vive: ``-Melez-vous de ce qui vous regarde. -Justement, ca fait une demi-heure que vous me regardez. -Alors melez-vous plutot de vos oignons.'' Devant mes yeux qui s'emplissaient de larmes, elle excusa sa rudesse. Je la rassurai: ``-Non ce n'est pas grave, mes oignons me font toujours cet effet. -Vous avez vraiment de droles de reactions, vous devriez aller vous faire examiner par un medecin. -C'est ca, envoyez-moi donc me faire voir ailleurs!'' Voyant mon cristallin devenir amorphe sous l'effet de la deception, elle comprit toute la sensibilite que mon caractere avait peine a dissimuler par de vains artifices indignent de mes veritables valeurs les plus humaines avec lesquelles... Enfin bref, vous voyez le genre. Une fois l'examen termine, vint le temps de choisir une monture, et surtout, de payer le tout. Malheureusement, une facture a la main, cette optometriste perdait beaucoup de son charme. ``-Les lunettes, ca coute les yeux de la tete!, lui dis-je. -La vue, ca n'a pas de prix: il ne faut pas regarder la depense.'' Tiraille entre mon equilibre sentimental et financier, j'avais tant de mal a me concentrer, que je n'arrivais pas a retrouver le mot ``optometriste''. -Mais, madame la voyante... -Je ne suis pas voyante! -Madame la... voyeuse... -Je ne suis pas voyeuse! -Mais madame la visuelle... -Je ne suis pas visuelle. -Madame l'auditive alors... ce prix en est exorbitant! -Gardez vos yeux dans vos orbites si vous voulez profiter de vos lunettes. -Mais regardez moi le prix de cette monture: a ce prix la, ca doit etre une monture pur sang! -Si vous voulez economiser, nous avons un special 2 pour 1 sur les verres de contacts. -J'espere qu'on en donne deux verres de contacts! -Deux paires, bien sur. -Ah, dans ce cas, je vais y regarder a deux fois. -A ce prix, ca vaut le coup d'oeil, ou plutot, le cout d'oeil. -Non, apres tout, n'essayez pas de m'en mettre plein la vue: je prefere garder mes distances et prendre des lunettes. -Soit, faites comme vous voulez.'' Je reglai alors la facture, un peu mecontent. Je devais alors certainement lui laisser une mauvaise impression. Il etait temps de montrer a nouveau mon interet pour elle, au risque de me faire pointer du doigt ou de me mettre le doigt dans l'oeil, ce qui, devant une optometriste, revient a peu pres au meme. ``Vous etes une optometriste. Voulez-vous devenir une optomeheureuse?'' Fort encourage par le hochement de tete et le rire de sa bouche, je poursuivis avec les questions d'usage: ``-Vous habitez chez vos parents? -Oui et non: j'ai un appartement mais je reviens souvent voir mes parents. J'ai un double foyer! -Vous voulez qu'on se revoie? -Si vous voulez, on peut aller aux vues ensemble. Quel film voulez-vous voir? -Il faudrait regarder dans le ``Voir'' (Note: Le journal...). -Vu!'' Enfin, grace a cette nouvelle paire de lunettes, je me suis fait une nouvelle connaissance. Ce sont, en somme, des lunettes d'approche. Les verres de ``contact'', ce sera pour plus tard... --< Remerciements >-- Je tiens a remercier... les membres eternels du ``Polyscope'', pour avoir continue a me publier en page deux, malgre mon haut taux d'absenteismes aux soirees de mise en page(!): Martin David, Nicolas Duchastel de Mont-Rouge, Mathieu Perreault, Alain Labelle, Olivier Touchette, Olivier Sommelet, Miguel Labreque, Nathalie Aube, Michele Laframboise... (et j'en oublie probablement); les membres quasi-eternels du ``Polyscope'', pour la meme raison, mais qui sont en nombre si impressionnant qu'il me serait difficile de les nommer tous; tous ceux qui ont relu mes textes, a chaque semaine, en quete de fautes: Marie-Josee Brabant, Marie-Claire Deschenes, Nicolas Turgeon, Annie Villandre; ceux qui ont relu tous mes textes afin d'y corriger les dernieres fautes, en vue produire ce livre: Emmanuelle Goulet, Chantal Marois; tous ceux qui m'ont averti lorsqu'un de mes textes etait mauvais; et bien sur, tout ceux qui ont eu le courage de lire mes articles a chaque semaine.